La traversée du Massif des Vosges, malgré tout !
Parti pour un trek de 4 mois, abandonné au bout de 16 jours.
Récit d'une aventure qui n'est pas passée du tout comme prévu...
Récit d'une aventure qui n'est pas passée du tout comme prévu...
Quand : 13/06/2024
Durée : 16 jours
Durée : 16 jours
Distance globale :
432km
Dénivelées :
+22478m /
-21133m
Alti min/max : 164m/1391m
Carnet publié par Béryl
le 05 nov.
modifié le 10 nov.
modifié le 10 nov.
Mobilité douce
Réalisé en utilisant transports en commun (train, bus, bateau...)
C'est possible (ou réalisé) en
train
Précisions :
Tous les trajets aller et retour ont été faits en train, à part un taxi dans Paris pour aller de la gare de l'Est à la gare Montparnasse.
298 lecteur(s)
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Vue d'ensemble
Le topo : Jour 3 - Château Nouveau Windstein/Lichtenberg (mise à jour : 06 nov.)
Distance section :
35km
Dénivelées section :
+1222m /
-1243m
Section Alti min/max : 199m/579m
Description :
Données GPS :
Distance : 35,45 km
Dénivelé positif : 1222 m
Dénivelé négatif : 1243 m
Distance : 35,45 km
Dénivelé positif : 1222 m
Dénivelé négatif : 1243 m
Le compte-rendu : Jour 3 - Château Nouveau Windstein/Lichtenberg (mise à jour : 06 nov.)
Vendredi 31 mai 2024
Le ciel a pleuré son chagrin une bonne partie de la nuit. Il semble s'être apaisé ce matin quand je mets le nez dehors. Tout est trempe, tout dégouline, mais il ne pleut plus. La tente est rapidement essuyée avec ma microserviette de bain ; la cabane où j'ai prévu de m'arrêter aujourd'hui n'a pas de douche ni de point d'eau à proximité, je ne devrais pas en avoir besoin.
Il n'est pas 7h00 quand je lève le camp. Les deux Allemands ronflent encore sous leur tente. Je lève les yeux : les nuages bas menacent de crever à tout moment. Soupir.
L'ambiance brumeuse de la forêt m'incite à la rêverie ; il ne m'en faut pas plus pour m'évader. Un peu trop, d'ailleurs : deux malandrins plutôt balèzes semblent m'attendre dissimulés dans le brouillard. Je m'arrête, observe. Ils ne bougent pas. Que font ces gens dans les bois de si bon matin, si ce n'est pister le randonneur pour le dépouiller ? J'hésite à sortir du chemin et m'aventurer entre les arbres. Je suis à découvert, ils ne peineront pas à me suivre. Bon, après tout, j'ai mes bâtons et je sais me défendre. J'avance. Je trouve quand même bizarre qu'ils ne bougent pas d'un poil. Et si ?...
Le ciel a pleuré son chagrin une bonne partie de la nuit. Il semble s'être apaisé ce matin quand je mets le nez dehors. Tout est trempe, tout dégouline, mais il ne pleut plus. La tente est rapidement essuyée avec ma microserviette de bain ; la cabane où j'ai prévu de m'arrêter aujourd'hui n'a pas de douche ni de point d'eau à proximité, je ne devrais pas en avoir besoin.
Il n'est pas 7h00 quand je lève le camp. Les deux Allemands ronflent encore sous leur tente. Je lève les yeux : les nuages bas menacent de crever à tout moment. Soupir.
L'ambiance brumeuse de la forêt m'incite à la rêverie ; il ne m'en faut pas plus pour m'évader. Un peu trop, d'ailleurs : deux malandrins plutôt balèzes semblent m'attendre dissimulés dans le brouillard. Je m'arrête, observe. Ils ne bougent pas. Que font ces gens dans les bois de si bon matin, si ce n'est pister le randonneur pour le dépouiller ? J'hésite à sortir du chemin et m'aventurer entre les arbres. Je suis à découvert, ils ne peineront pas à me suivre. Bon, après tout, j'ai mes bâtons et je sais me défendre. J'avance. Je trouve quand même bizarre qu'ils ne bougent pas d'un poil. Et si ?...
Le sourire et la honte après l'angoisse. Des malandrins... Quelques troncs entremêlés qui s'élèvent dans la brume, tout au plus. Rien de bien dangereux si on les voit à temps ! Bah, je mets ça sur le compte d'une mauvaise nuit !
Très vite, je rencontre ma première tour. Il y en aura plusieurs les jours suivants. Je ne sais pas à quoi servaient ces constructions exactement, à part un joli point de vue, encore que certaines ne montent pas bien haut.
Celle-ci est la tour du Grand Wintersberg, haute de vingt-cinq mètres, propriété du célèbre Club Vosgien.
Très vite, je rencontre ma première tour. Il y en aura plusieurs les jours suivants. Je ne sais pas à quoi servaient ces constructions exactement, à part un joli point de vue, encore que certaines ne montent pas bien haut.
Celle-ci est la tour du Grand Wintersberg, haute de vingt-cinq mètres, propriété du célèbre Club Vosgien.
La pluie tombe par intermittence. Globalement en sous-bois, le chemin est plutôt abrité. Seuls les passages dégagés se font au pas de course pour ne pas avoir à sortir le poncho. J'arriverai ainsi à jongler entre les averses toute la journée. Usant, aussi bien physiquement que moralement.
Je ne croise personne ; qui se promènerait par un temps pareil ? Les randonneurs au long cours, pardi !
Ceux qui parcourent (ou ont parcouru ou prévoient de parcourir) l'Hexatrek ont un lieu de rassemblement sur la toile où les discussions vont bon train. On se soutient, on s'encourage, on se conseille. On guette les comptes-rendus de ceux qui sont devant, on laisse un détail : telle source est tarie, tel commerce est fermé, tel hôte est génial ou telle cabane est grand luxe ! Ces informations sont capitales et servent notamment à mettre à jour la base de données dont s'abreuve l'application que tout le monde a sur son téléphone.
Voilà deux jours, Diane indique qu'elle a perdu une chaussette peu avant Niederbronn. Sait-on jamais ? Ce n'est pas tant la valeur qui compte que le prétexte pour s'attendre ou se retrouver.
Et devinez sur quoi je tombe peu avant la ville, justement ?...
Je ne croise personne ; qui se promènerait par un temps pareil ? Les randonneurs au long cours, pardi !
Ceux qui parcourent (ou ont parcouru ou prévoient de parcourir) l'Hexatrek ont un lieu de rassemblement sur la toile où les discussions vont bon train. On se soutient, on s'encourage, on se conseille. On guette les comptes-rendus de ceux qui sont devant, on laisse un détail : telle source est tarie, tel commerce est fermé, tel hôte est génial ou telle cabane est grand luxe ! Ces informations sont capitales et servent notamment à mettre à jour la base de données dont s'abreuve l'application que tout le monde a sur son téléphone.
Voilà deux jours, Diane indique qu'elle a perdu une chaussette peu avant Niederbronn. Sait-on jamais ? Ce n'est pas tant la valeur qui compte que le prétexte pour s'attendre ou se retrouver.
Et devinez sur quoi je tombe peu avant la ville, justement ?...
En milieu de matinée, j'arrive à Niederbronn-les-Bains, une ville qui, sous la pluie, porte bien son nom !
J'avais noté dans mon road-book qu'on pouvait éviter deux kilomètres de bitume en coupant par le grand rond-point sur lequel arrive le chemin sans entrer dans la ville. Seulement là, avec le temps et mon envie irrépressible de café, je rallonge sans hésiter.
Je suis donc précisément la trace et me pose à la terrasse d'une pâtisserie qui fait aussi salon de thé. Je ne résiste pas à l'envie d'agrémenter mon café d'un éclair au chocolat et prends mon temps, les pieds à l'air, pour déguster ces mets divins (oui, en trek, un bon café et une pâtisserie, c'est divin !). J'en profite pour laisser un petit mot à Diane. Elle me répondra un moment après, folle de joie. À quoi ça tient, parfois, le bonheur ! Elle a eu un problème de santé et a dû rentrer chez elle, mais elle compte fermement reprendre le chemin dès que possible. À moi de trouver un endroit où lui laisser sa chaussette.
J'avais noté dans mon road-book qu'on pouvait éviter deux kilomètres de bitume en coupant par le grand rond-point sur lequel arrive le chemin sans entrer dans la ville. Seulement là, avec le temps et mon envie irrépressible de café, je rallonge sans hésiter.
Je suis donc précisément la trace et me pose à la terrasse d'une pâtisserie qui fait aussi salon de thé. Je ne résiste pas à l'envie d'agrémenter mon café d'un éclair au chocolat et prends mon temps, les pieds à l'air, pour déguster ces mets divins (oui, en trek, un bon café et une pâtisserie, c'est divin !). J'en profite pour laisser un petit mot à Diane. Elle me répondra un moment après, folle de joie. À quoi ça tient, parfois, le bonheur ! Elle a eu un problème de santé et a dû rentrer chez elle, mais elle compte fermement reprendre le chemin dès que possible. À moi de trouver un endroit où lui laisser sa chaussette.
Dès la sortie de la ville, j'attaque la montée vers le château de Wasenbourg. Là-haut, une horde de touristes a envahi les lieux. Ça gesticule, ça parle fort. Dommage, je comptais le visiter et m'y poser pour casser la croûte, mais j'y renonce devant les pénibles qui bloquent l'entrée pour faire des selfies. Pas envie de me retrouver sur leurs réseaux sociaux. Je continue ma route.
Un peu avant 14h00, j'arrive au refuge du col de l'Ungerthal. Enfin, refuge, disons cabane. Enfin, cabane, disons abri. Pas de porte, pas de fenêtre à fermer, un escalier pour monter à l'étage plus que sommaire, mais une belle table de pique-nique devant et surtout une source identifiée pas très loin. Très importante, la source. Les bivouacs où l'eau doit être rationnée ne sont jamais agréables. Il faut toujours faire l'impasse sur un besoin essentiel : repas, hygiène ou hydratation. D'où l'importance des sources identifiées soit sur la carte, soit sur l'application. Comme je n'utilise pas cette dernière, il m'a fallu faire un road-book très précis à ce sujet.
J'hésite tout de même à passer la nuit ici. Les cabanes fermées sont connues pour abriter une population de rongeurs ou autres insectes gênants, alors celles ouvertes...
Et puis la configuration des lieux m'oblige à poser mon matelas pile en face de l'ouverture.
Bon, je me pose pour manger un peu et je vais y réfléchir.
J'hésite tout de même à passer la nuit ici. Les cabanes fermées sont connues pour abriter une population de rongeurs ou autres insectes gênants, alors celles ouvertes...
Et puis la configuration des lieux m'oblige à poser mon matelas pile en face de l'ouverture.
Bon, je me pose pour manger un peu et je vais y réfléchir.
Je termine mon pain/saucisson/pomme quand arrive un gars au pas assuré qui fonce vers ma table. Sec et nerveux, il se pose à son tour pour jeter un œil à son GPS. On papote un moment et je lui fais part de mon hésitation à passer la nuit ici, finalement. C'est précisément ce qu'il comptait faire, mais vu l'état de la cabane, il préfère continuer.
"Continuer jusqu'où ? je lui demande.
- Lichtenberg où il y a un refuge municipal.
- Oula, ça fait loin !
- Une grosse dizaine de kilomètres, je dirais, mais au moins, je suis au sec et au chaud", me répond-il en me fixant de ses yeux clairs.
L'argument est de premier choix ! Je voulais faire une petite étape et vingt-trois kilomètres étaient bien suffisants pour moi, aujourd'hui, mais j'avoue que le dur, le sec et le chaud, avec la nuit que je viens de passer, c'est très tentant !
"Ok, je te suis. Laisse-moi deux minutes pour ranger mon barda et on y va !"
Et c'est ainsi que je me retrouve à marcher, trotter même par moment pour suivre son rythme, avec Denis, ancien gendarme du PGHM à la retraite et testeur officiel pour Décathlon. D'ailleurs, il est équipé entièrement D4 qui lui fournit tout le matériel à tester en situation en échange d'un compte-rendu précis et sans concession.
Très vite, je sais que je ne pourrai pas le suivre. Onze kilomètres à faire à cette cadence en en ayant déjà plus de vingt dans les pattes, c'est mort pour moi.
"Pars devant, je ralentis. On se retrouve au gite, en espérant qu'il soit ouvert !" lui dis-je en soufflant.
C'est mon troisième jour de marche, le corps est en rodage, inutile de le brusquer.
Je ne le lâcherai pas de vue, cela dit, au fur et à mesure des kilomètres. Il marche vite, certes, mais il est très bavard et a le contact facile, aussi s'arrête-t-il régulièrement pour taper la causette dans les bourgades que l'on traverse.
Quand Lichtenberg est en vue, je remarque qu'il sort de la trace et emprunte une route. Mon GPS m'indique qu'elle rallonge pas mal, aussi je préfère rester sur le chemin. Peut-être aurais-je dû le suivre, finalement ; je dois traverser de hautes herbes imbibées d'eau qui me trempent complètement des pieds aux cuisses. Quand bien même, j'arrive avant lui au village ; rien ne sert de courir !
Le refuge municipal est vite trouvé et j'appelle le numéro indiqué sur la porte en espérant très fort que quelqu'un vienne nous ouvrir. Il pleut à nouveau et pas question de sortir la tente ce soir.
Ah le soulagement quand une dame me répond qu'elle arrive !
Le gite est grand luxe ! Une chambre à deux lits avec salle de bain intégrée, une vaste salle à manger et une cuisine inox entièrement équipée. Il y a même la télé, ce qui nous est complètement égal.
Nous ne sortirons pas chercher des pizzas au restaurant du coin, comme nous l'a conseillé notre hôte. Trop pressés de faire sécher nos affaires, nous nous mettrons à l'aise pour prendre un bon repas sur nos réserves et faire un peu plus connaissance.
Dehors, la pluie continue à battre le pavé.
Elle le fera toute la nuit.
"Continuer jusqu'où ? je lui demande.
- Lichtenberg où il y a un refuge municipal.
- Oula, ça fait loin !
- Une grosse dizaine de kilomètres, je dirais, mais au moins, je suis au sec et au chaud", me répond-il en me fixant de ses yeux clairs.
L'argument est de premier choix ! Je voulais faire une petite étape et vingt-trois kilomètres étaient bien suffisants pour moi, aujourd'hui, mais j'avoue que le dur, le sec et le chaud, avec la nuit que je viens de passer, c'est très tentant !
"Ok, je te suis. Laisse-moi deux minutes pour ranger mon barda et on y va !"
Et c'est ainsi que je me retrouve à marcher, trotter même par moment pour suivre son rythme, avec Denis, ancien gendarme du PGHM à la retraite et testeur officiel pour Décathlon. D'ailleurs, il est équipé entièrement D4 qui lui fournit tout le matériel à tester en situation en échange d'un compte-rendu précis et sans concession.
Très vite, je sais que je ne pourrai pas le suivre. Onze kilomètres à faire à cette cadence en en ayant déjà plus de vingt dans les pattes, c'est mort pour moi.
"Pars devant, je ralentis. On se retrouve au gite, en espérant qu'il soit ouvert !" lui dis-je en soufflant.
C'est mon troisième jour de marche, le corps est en rodage, inutile de le brusquer.
Je ne le lâcherai pas de vue, cela dit, au fur et à mesure des kilomètres. Il marche vite, certes, mais il est très bavard et a le contact facile, aussi s'arrête-t-il régulièrement pour taper la causette dans les bourgades que l'on traverse.
Quand Lichtenberg est en vue, je remarque qu'il sort de la trace et emprunte une route. Mon GPS m'indique qu'elle rallonge pas mal, aussi je préfère rester sur le chemin. Peut-être aurais-je dû le suivre, finalement ; je dois traverser de hautes herbes imbibées d'eau qui me trempent complètement des pieds aux cuisses. Quand bien même, j'arrive avant lui au village ; rien ne sert de courir !
Le refuge municipal est vite trouvé et j'appelle le numéro indiqué sur la porte en espérant très fort que quelqu'un vienne nous ouvrir. Il pleut à nouveau et pas question de sortir la tente ce soir.
Ah le soulagement quand une dame me répond qu'elle arrive !
Le gite est grand luxe ! Une chambre à deux lits avec salle de bain intégrée, une vaste salle à manger et une cuisine inox entièrement équipée. Il y a même la télé, ce qui nous est complètement égal.
Nous ne sortirons pas chercher des pizzas au restaurant du coin, comme nous l'a conseillé notre hôte. Trop pressés de faire sécher nos affaires, nous nous mettrons à l'aise pour prendre un bon repas sur nos réserves et faire un peu plus connaissance.
Dehors, la pluie continue à battre le pavé.
Elle le fera toute la nuit.