La traversée du Massif des Vosges, malgré tout !
Parti pour un trek de 4 mois, abandonné au bout de 16 jours.
Récit d'une aventure qui n'est pas passée du tout comme prévu...
Récit d'une aventure qui n'est pas passée du tout comme prévu...
Quand : 13/06/2024
Durée : 16 jours
Durée : 16 jours
Distance globale :
432km
Dénivelées :
+22478m /
-21133m
Alti min/max : 164m/1391m
Carnet publié par Béryl
le 05 nov.
modifié le 10 nov.
modifié le 10 nov.
Mobilité douce
Réalisé en utilisant transports en commun (train, bus, bateau...)
C'est possible (ou réalisé) en
train
Précisions :
Tous les trajets aller et retour ont été faits en train, à part un taxi dans Paris pour aller de la gare de l'Est à la gare Montparnasse.
298 lecteur(s)
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Vue d'ensemble
Le topo : Jour 14 - Journée de repos à Thann (mise à jour : 09 nov.)
Description :
Données GPS :
Distance : 0 km
Dénivelé positif : 0 m
Dénivelé négatif : 0 m
Distance : 0 km
Dénivelé positif : 0 m
Dénivelé négatif : 0 m
Le compte-rendu : Jour 14 - Journée de repos à Thann (mise à jour : 09 nov.)
Mardi 11 juin 2024
C'est rouge, c'est gonflé, ça craint.
Dès le réveil, j'ai vérifié. Planté devant le miroir de la salle de bain, le verdict est implacable : je dois me faire soigner.
Hier soir, le repas terminé, je suis remonté dans ma chambre. Coup de fil à ma femme pour lui dire que tout va bien finalement après la galère de fin de journée. Debout en caleçon, j'arpente la chambre en tout sens comme en manque de marche, déjà. Une main tient le téléphone et l'autre s'acharne sur un bouton qui me gratte sur le côté droit au-dessus de la fesse. Je sais que j'ai un grain de beauté à cet endroit, aussi je vérifie que je ne suis pas en train de m'acharner dessus. Non, ce n'est pas un grain de beauté. C'est noir, c'est en relief et... "Merde, j'ai chopé une tique à l'aine !
- Tu as de quoi l'enlever proprement ? me demande Christine, ma femme.
- Oui, j'ai un tire-tique et tout le nécessaire dont tu as bourré ma pharmacie !
- Oui bin tu vois, ça peut toujours servir !
Je ne lui rappelle pas que les "ça peut servir" alourdissent considérablement le poids du sac à dos.
- Je te laisse, il me faut les deux mains libres.
- Fais attention et désinfecte bien. Si demain c'est rouge et gonflé, tu vois un médecin.
- Sérieux ? Comment veux-tu que j'aie un rendez-vous si vite ?
- Tu te débrouilles, mais tu ne laisses pas trainer ! Au pire, tu vas aux urgences."
Ma femme est infirmière ; son anxiété est proportionnelle à tout ce que j'ai enlevé de ma pharmacie qu'elle avait remplie. Je sais aussi que ses conseils ne sont pas à prendre à la légère, ayant déjà croisé une personne atteinte de la maladie de Lyme. Un calvaire.
Aussi, ce matin dès le réveil, je me contorsionne dans le lit pour voir un joli point rouge en relief à la place de la tique que j'ai enlevée la veille. Le miroir confirme.
À 8h00 pétante, j'appelle trois cabinets médicaux de la ville. Un me donne rendez-vous dans une semaine, le deuxième me dit ne pas prendre de nouveaux patients, le troisième ne répond pas.
Petit déjeuner rapidement avalé, je sors de l'hôtel sac au dos et me dirige vers le centre hospitalier devant lequel je suis passé la veille. L'idée de passer la journée à attendre aux urgences ne m'enchante pas du tout, mais pas question en effet de tenter le diable.
Il est 8h20 quand je pénètre dans la salle d'attente. Trois personnes sont déjà là. Je m'attendais à pire. Tout le monde patiente devant le guichet fermé et quand le rideau s'ouvre avec un peu de retard, chacun va se présenter et retourne s'assoir en attendant qu'on l'appelle. Des patients patients. Je suis impressionné par le calme ambiant. Quand arrive mon tour, la salle est pleine, mais toujours aussi sereine. Je prends mon sac à dos, calé derrière la porte du service pour ne pas gêner, et suis le médecin qui me prend en charge.
Son examen est rapide. Effectivement, il ne faut pas laisser trainer : une semaine d'antibiotiques. Alors qu'il est sorti pour me faire une ordonnance, mon téléphone vibre. La dame du gite m'indique qu'il y a des places libres pour ce soir ! Je n'hésite pas et lui dis que j'arrive de suite pour réserver. Pas familier des journées de repos, je saute sur l'occasion pour m'en accorder une. Ce ne sera pas du luxe.
Après un passage par la pharmacie, me voilà à l'accueil du gite. Nous papotons un bon moment avec la dame qui me reçoit. Je commence à savourer ma journée "off" quand on aborde la météo d'aujourd'hui qui s'annonce une fois de plus humide. Je profite de l'occasion pour réserver une chambre pour Thierry qui doit arriver en fin d'après-midi ; je pense qu'il sera content d'avoir une place au sec et au chaud pour ce soir.
Le gite est grand et tout confort. Une belle cuisine bien équipée est à disposition. J'apprends que certaines chambres sont réservées par la mairie et mises à disposition d'internes en médecine venus de loin. Donnant donnant.
Après la visite et l'installation, je passe en cuisine pour un petit café. Tout est fourni ! Je me pose et profite un long moment du wifi pour envoyer mes nombreuses photos dans les nuages (enfin, le nuage, pour être précis !). La vitesse du réseau n'est pas folichonne, mais j'ai tout mon temps.
Et puis l'envie de marcher me rattrape vite et il faut que je me fasse violence pour attendre que tous les fichiers soient transférés en sécurité. Sitôt fait, je rechausse les groles et pars musarder dans les rues.
Thann n'est pas une grande ville et j'en ai vite fait le tour. Petit passage par la supérette pour les repas de midi, du soir et le petit déjeuner et je rentre au gite sous de lourds nuages noirs qui ne tardent pas à crever.
Ma femme rassurée et Thierry prévenu, je n'ai plus aucune obligation et passe l'après-midi à bouquiner sur ma liseuse. Petite pensée pour Thierry en espérant que la pluie l'épargne.
Drôle de sensation pour cette journée ; sentiments mêlés de culpabilité d'avoir perdu un jour sur mon périple et de satisfaction de m'être reposé, à l'abri des intempéries avec autre chose à manger que du saucisson, une pomme et de la semoule. Comme je le disais plus haut, c'est nouveau pour moi. Sur une aventure de cette ampleur, c'est indispensable, du moins c'est ce que la sagesse populaire (comprenez : des randonneurs aguéris) laisse entendre. Pour moi, tant que je n'en ressens pas le besoin, pourquoi m'arrêter ? Pourtant, la sagesse dit aussi qu'il ne faut justement pas attendre d'en avoir besoin pour se l'accorder et cette journée "zéro", suspendue entre la marche et le quotidien de la maison, finit de me convaincre du bienfait de ces pauses. Ce n'est pas un jour perdu, non, c'est juste un jour de plus sur le parcours, un jour différent, un jour qui permet de recharger toutes les batteries quelles qu'elles soient et repartir du bon pied, le moral regonflé.
Mais mon moral n'est pas au beau fixe ; je m'inquiète pour mon sac à dos. L'armature brisée charcute mon matériel et le portage n'est pas confortable. Aucun réglage ne compense le poids déporté sur les épaules. Les hanches, qui d'habitude portent la majorité de la charge, sont allégées malgré le serrage de ma ceinture ventrale. Je ne sais pas quoi faire. Bien sûr, je pourrais rejoindre une grande ville et m'en acheter un autre, mais laisser mon vieil ami dans une poubelle me répugne. Je pourrais aussi le renvoyer à la maison, mais s'il est réparable, pourquoi m'en acheter un autre ?
Et réparable, il l'est et très facilement en plus, mais ça, je ne le sais pas encore.
C'est perdu dans mes pensées que je reçois un texto de Thierry. Il arrive. Rendez-vous est pris en centre-ville où je le rejoins quelques minutes après. Ne trouvant pas de troquet où boire une bière, nous nous dirigeons vers la supérette où Thierry veut faire quelques courses, puis direction le gite.
Il est tellement content que je lui aie réservé une place qu'il décide lui aussi de prolonger le plaisir en s'accordant une journée de repos pour le lendemain.
Après la douche, les bières achetées à la supérette sont dégustées en apéritif pendant que nos plats respectifs glougloutent sur la plaque de la cuisine. On se raconte nos petites galères et, très vite, Thierry part se coucher. Il faut dire qu'il a eu une journée un peu plus sportive que la mienne !
Je reste seul à table un moment avant d'être rejoint par un jeune homme qui met à cuire ses ravioles dans une casserole pleine d'eau. La discussion s'engage. C'est un interne en médecine ; si tout va bien, il aura fini son parcours d'études en même temps que j'aurai fini le mien pédestre. Très curieux des treks à long terme, il me bombarde de questions. Bien entendu, le côté médical s'incruste dans la conversation. Il semble étonné du dosage des antibiotiques prescrits par le médecin des urgences : "Il n'a pas voulu prendre de risque, sachant qu'il ne te reverrait probablement pas !", me lance-t-il comme explication. C'est aussi celle donnée par le pharmacien qui m'a servi. J'espère juste que cela ne va pas me flinguer l'estomac.
Nous discuterons ainsi un long moment avant que le sommeil nous rattrape tous les deux.
De retour dans la chambre, je me couche sans faire de bruit pour ne pas réveiller Thierry qui ronfle légèrement.
Morphée n'acceptera de m'ouvrir ses bras qu'une fois que j'aurai fait taire les nombreuses questions qui se bousculent alors dans ma tête.
C'est rouge, c'est gonflé, ça craint.
Dès le réveil, j'ai vérifié. Planté devant le miroir de la salle de bain, le verdict est implacable : je dois me faire soigner.
Hier soir, le repas terminé, je suis remonté dans ma chambre. Coup de fil à ma femme pour lui dire que tout va bien finalement après la galère de fin de journée. Debout en caleçon, j'arpente la chambre en tout sens comme en manque de marche, déjà. Une main tient le téléphone et l'autre s'acharne sur un bouton qui me gratte sur le côté droit au-dessus de la fesse. Je sais que j'ai un grain de beauté à cet endroit, aussi je vérifie que je ne suis pas en train de m'acharner dessus. Non, ce n'est pas un grain de beauté. C'est noir, c'est en relief et... "Merde, j'ai chopé une tique à l'aine !
- Tu as de quoi l'enlever proprement ? me demande Christine, ma femme.
- Oui, j'ai un tire-tique et tout le nécessaire dont tu as bourré ma pharmacie !
- Oui bin tu vois, ça peut toujours servir !
Je ne lui rappelle pas que les "ça peut servir" alourdissent considérablement le poids du sac à dos.
- Je te laisse, il me faut les deux mains libres.
- Fais attention et désinfecte bien. Si demain c'est rouge et gonflé, tu vois un médecin.
- Sérieux ? Comment veux-tu que j'aie un rendez-vous si vite ?
- Tu te débrouilles, mais tu ne laisses pas trainer ! Au pire, tu vas aux urgences."
Ma femme est infirmière ; son anxiété est proportionnelle à tout ce que j'ai enlevé de ma pharmacie qu'elle avait remplie. Je sais aussi que ses conseils ne sont pas à prendre à la légère, ayant déjà croisé une personne atteinte de la maladie de Lyme. Un calvaire.
Aussi, ce matin dès le réveil, je me contorsionne dans le lit pour voir un joli point rouge en relief à la place de la tique que j'ai enlevée la veille. Le miroir confirme.
À 8h00 pétante, j'appelle trois cabinets médicaux de la ville. Un me donne rendez-vous dans une semaine, le deuxième me dit ne pas prendre de nouveaux patients, le troisième ne répond pas.
Petit déjeuner rapidement avalé, je sors de l'hôtel sac au dos et me dirige vers le centre hospitalier devant lequel je suis passé la veille. L'idée de passer la journée à attendre aux urgences ne m'enchante pas du tout, mais pas question en effet de tenter le diable.
Il est 8h20 quand je pénètre dans la salle d'attente. Trois personnes sont déjà là. Je m'attendais à pire. Tout le monde patiente devant le guichet fermé et quand le rideau s'ouvre avec un peu de retard, chacun va se présenter et retourne s'assoir en attendant qu'on l'appelle. Des patients patients. Je suis impressionné par le calme ambiant. Quand arrive mon tour, la salle est pleine, mais toujours aussi sereine. Je prends mon sac à dos, calé derrière la porte du service pour ne pas gêner, et suis le médecin qui me prend en charge.
Son examen est rapide. Effectivement, il ne faut pas laisser trainer : une semaine d'antibiotiques. Alors qu'il est sorti pour me faire une ordonnance, mon téléphone vibre. La dame du gite m'indique qu'il y a des places libres pour ce soir ! Je n'hésite pas et lui dis que j'arrive de suite pour réserver. Pas familier des journées de repos, je saute sur l'occasion pour m'en accorder une. Ce ne sera pas du luxe.
Après un passage par la pharmacie, me voilà à l'accueil du gite. Nous papotons un bon moment avec la dame qui me reçoit. Je commence à savourer ma journée "off" quand on aborde la météo d'aujourd'hui qui s'annonce une fois de plus humide. Je profite de l'occasion pour réserver une chambre pour Thierry qui doit arriver en fin d'après-midi ; je pense qu'il sera content d'avoir une place au sec et au chaud pour ce soir.
Le gite est grand et tout confort. Une belle cuisine bien équipée est à disposition. J'apprends que certaines chambres sont réservées par la mairie et mises à disposition d'internes en médecine venus de loin. Donnant donnant.
Après la visite et l'installation, je passe en cuisine pour un petit café. Tout est fourni ! Je me pose et profite un long moment du wifi pour envoyer mes nombreuses photos dans les nuages (enfin, le nuage, pour être précis !). La vitesse du réseau n'est pas folichonne, mais j'ai tout mon temps.
Et puis l'envie de marcher me rattrape vite et il faut que je me fasse violence pour attendre que tous les fichiers soient transférés en sécurité. Sitôt fait, je rechausse les groles et pars musarder dans les rues.
Thann n'est pas une grande ville et j'en ai vite fait le tour. Petit passage par la supérette pour les repas de midi, du soir et le petit déjeuner et je rentre au gite sous de lourds nuages noirs qui ne tardent pas à crever.
Ma femme rassurée et Thierry prévenu, je n'ai plus aucune obligation et passe l'après-midi à bouquiner sur ma liseuse. Petite pensée pour Thierry en espérant que la pluie l'épargne.
Drôle de sensation pour cette journée ; sentiments mêlés de culpabilité d'avoir perdu un jour sur mon périple et de satisfaction de m'être reposé, à l'abri des intempéries avec autre chose à manger que du saucisson, une pomme et de la semoule. Comme je le disais plus haut, c'est nouveau pour moi. Sur une aventure de cette ampleur, c'est indispensable, du moins c'est ce que la sagesse populaire (comprenez : des randonneurs aguéris) laisse entendre. Pour moi, tant que je n'en ressens pas le besoin, pourquoi m'arrêter ? Pourtant, la sagesse dit aussi qu'il ne faut justement pas attendre d'en avoir besoin pour se l'accorder et cette journée "zéro", suspendue entre la marche et le quotidien de la maison, finit de me convaincre du bienfait de ces pauses. Ce n'est pas un jour perdu, non, c'est juste un jour de plus sur le parcours, un jour différent, un jour qui permet de recharger toutes les batteries quelles qu'elles soient et repartir du bon pied, le moral regonflé.
Mais mon moral n'est pas au beau fixe ; je m'inquiète pour mon sac à dos. L'armature brisée charcute mon matériel et le portage n'est pas confortable. Aucun réglage ne compense le poids déporté sur les épaules. Les hanches, qui d'habitude portent la majorité de la charge, sont allégées malgré le serrage de ma ceinture ventrale. Je ne sais pas quoi faire. Bien sûr, je pourrais rejoindre une grande ville et m'en acheter un autre, mais laisser mon vieil ami dans une poubelle me répugne. Je pourrais aussi le renvoyer à la maison, mais s'il est réparable, pourquoi m'en acheter un autre ?
Et réparable, il l'est et très facilement en plus, mais ça, je ne le sais pas encore.
C'est perdu dans mes pensées que je reçois un texto de Thierry. Il arrive. Rendez-vous est pris en centre-ville où je le rejoins quelques minutes après. Ne trouvant pas de troquet où boire une bière, nous nous dirigeons vers la supérette où Thierry veut faire quelques courses, puis direction le gite.
Il est tellement content que je lui aie réservé une place qu'il décide lui aussi de prolonger le plaisir en s'accordant une journée de repos pour le lendemain.
Après la douche, les bières achetées à la supérette sont dégustées en apéritif pendant que nos plats respectifs glougloutent sur la plaque de la cuisine. On se raconte nos petites galères et, très vite, Thierry part se coucher. Il faut dire qu'il a eu une journée un peu plus sportive que la mienne !
Je reste seul à table un moment avant d'être rejoint par un jeune homme qui met à cuire ses ravioles dans une casserole pleine d'eau. La discussion s'engage. C'est un interne en médecine ; si tout va bien, il aura fini son parcours d'études en même temps que j'aurai fini le mien pédestre. Très curieux des treks à long terme, il me bombarde de questions. Bien entendu, le côté médical s'incruste dans la conversation. Il semble étonné du dosage des antibiotiques prescrits par le médecin des urgences : "Il n'a pas voulu prendre de risque, sachant qu'il ne te reverrait probablement pas !", me lance-t-il comme explication. C'est aussi celle donnée par le pharmacien qui m'a servi. J'espère juste que cela ne va pas me flinguer l'estomac.
Nous discuterons ainsi un long moment avant que le sommeil nous rattrape tous les deux.
De retour dans la chambre, je me couche sans faire de bruit pour ne pas réveiller Thierry qui ronfle légèrement.
Morphée n'acceptera de m'ouvrir ses bras qu'une fois que j'aurai fait taire les nombreuses questions qui se bousculent alors dans ma tête.