L'Irlande par Jacqueline ! La verte Érin, pour un tour complet à vélo.
64 jours
5613km
+19281m
/ -19251m
L'irlande ! La Verte Érin... aux paysages verdoyants. République d’Irlande, Irlande du Nord, voilà mon projet de cette année 2025 pour un tour complet de trois mille kilomètres auquel il faudra ajouter ma traversée de la France de Roscoff à Besançon : mille-cinq-cents kilomètres.
Partir seule à vélo pour faire le tour de France, rallier Saint-Nazaire à la mer Noire ou encore pédaler de Besançon jusqu’au cap Nord, ce n’est pas simplement admirer des paysages, des villes, des musées et goûter à de nouvelles saveurs. C’est aussi l’occasion de rencontrer d’autres cultures, de plonger dans des traditions inconnues et, peut-être plus que tout, d’apprendre à se connaître soi-même.
Partir seule à vélo pour faire le tour de France, rallier Saint-Nazaire à la mer Noire ou encore pédaler de Besançon jusqu’au cap Nord, ce n’est pas simplement admirer des paysages, des villes, des musées et goûter à de nouvelles saveurs. C’est aussi l’occasion de rencontrer d’autres cultures, de plonger dans des traditions inconnues et, peut-être plus que tout, d’apprendre à se connaître soi-même.
Activité :
vélo de randonnée
Statut :
en cours
Distance :
5613km
DATE :
02/07/2025
Durée :
64 jours
Dénivelées :
+19281m
/ -19251m
Alti min/max :
0m/550m
Mobilité douce
Réalisé en utilisant transports en commun (train, bus, bateau...)
C'est possible (ou réalisé) en
train
ferry
Mise à jour section : 11 sept.
316km
+1144m
/ -994m
1m/260m
IRLANDE DU NORD
IRLANDE DU NORD
Mardi 12 août - 42e jour
75 km /
Magilligan-Point / Castlerock
La première partie de cette journée, réalisée en République d'Irlande, est écrite sur la section 7.
Dès la descente du ferry, à Magilligan-Point j’aperçois une vaste plage. Elle accueille les familles et les promeneurs. Le soleil est là, faisant scintiller le sable doré. La mer d’un bleu turquoise appelle à la baignade.
Guère de changement d’un côté à l’autre de la frontière qui n’est matérialisée par aucun panneau. Sauf que maintenant, je dois compter en miles, acres, onces et payer en livres.
À ma gauche, séparée par un espace herbeux, une piste cyclable vient d’être asphaltée. Des poteaux en bois et des rouleaux de grillage sont posés au sol attendant la construction d’une séparation. Je m’engage sur la piste. Je pédale allègrement, ravie de ne pas rouler sur la route. Au loin, j’aperçois des tracteurs arrêtés sur cette voie. Puis l’un vient dans ma direction. Un homme en descend et se précipite vers moi.
Il m’explique brièvement : « Vous êtes en zone strictement interdite ! Il faut vite regagner la route ! » Il fait un geste avec bras et main pour imiter un fusil. Je n’y comprends rien ! Mais rien de rien !
Il s’empare de mon vélo, essaie de le porter pour lui faire franchir le talus, car maintenant la piste est surélevée par rapport à la route. Il se rend compte qu’on ne porte pas facilement ce vélo de presque cinquante kilogrammes. Pourtant c’est un homme très costaud. Et nous voici dévalant le talus, lui à l’avant du vélo tenant le guidon et moi, à l’arrière, accrochée au porte-bagages pour éviter que la bicyclette ne s’emballe.
À mon expression, il se rend compte que je suis apeurée par toute cette agitation et ce geste imitant un coup de fusil, et il poursuit : « C’est une zone militaire, vous pouvez emprunter la route, mais n’en sortez pas ! »
Je ne pédale plus allègrement, mais à toute vitesse ! Progressivement, je remarque que la voie que j’imaginais être une piste cyclable se perd dans les méandres d’un terrain derrière le grillage qui a été installé.
Je vois à présent de hauts grillages de chaque côté de la route sur lesquels, tous les trente mètres, des panneaux indiquent : « Zone militaire ! Interdiction ! »
Plongée dans les conversions de miles en kilomètres ne les aurais-je pas vus lorsque je me suis engagée sur la petite piste ! Toujours est-il qu’il m’a été facile de franchir une largeur d’un mètre d’herbe.
Puis je longe un haut mur de béton. Je me demande bien ce que l’armée peut cacher là derrière !
Je l’apprendrai ce soir au camping. C’est une prison ! La prison de Magilligan. Elle a ouvert ses portes en 1972 pour cinquante internés républicains irlandais et comprenait huit baraquements sur le site d’un camp militaire.
En 1976, le mur de la prison a été construit et la prison a commencé à accueillir d'autres détenus condamnés pour d’autres infractions. Magilligan est ainsi devenue une prison « normale » au regard des prisons d'Irlande du Nord. Le régime de la prison a donc été adapté en conséquence.
La prison a actuellement une capacité d'accueil de cinq-cent-soixante-huit détenus. Il s'agit d'une prison de sécurité moyenne qui accueille des détenus de sexe masculin ayant six ans ou moins de prison à purger et répondant aux critères de sécurité requis.
En 2017, la prison de Magilligan s'est avérée être la prison la plus performante d'Irlande du Nord, selon une inspection inopinée du service de justice pénale.
Je n’ai pas escaladé de grillage, mais il est manifeste que j’ai a priori enfreint la loi ! Mais comment pouvais-je le savoir ?
La prison de Magilligan ! Je m’en souviendrai ! Car à cet endroit, un militaire en civil m’a effrayée dans sa précipitation à me remettre dans le bon chemin.
Après cela, je traverse une vaste zone de culture ; je longe la côte et ses plages à n’en plus finir ; je fais une brève apparition dans un camping-ville avec camping-cars, caravanes, immenses tentes et animations en tout genre.
Je poursuis ma route et sur une piste cyclable, en bordure d’une nationale, je m’arrête auprès de Claudine et Jean-Jacques, toulousains et cyclo-voyageurs. Rencontre trop brève ! Cela faisait longtemps que je n’avais pas croisé de congénères à vélo. Cela me manquait ! Ils sont retraités comme moi. Claudine s’adonne au cyclo-voyage depuis moins longtemps que Jean-Jacques. D’après notre échange, nous avons les mêmes compétences dans les côtes. Jean-Jacques est allé au cap Nord, dans les Balkans aussi. C’est un vrai de vrai ! Enfin ! S’il a fait les pays au sud du Danube, j’ai fait en quelque sorte les pays au nord du Danube. Mais ils n’ont pas un nom d’ensemble. Cela fait moins rêver !
Puis ils partent à la ville-camping. Et moi je vais tâcher de trouver le camping indiqué par un panneau au bord de la route. Mais je n’y arriverai pas après avoir fait une multitude de kilomètres.
Depuis la frontière, je n’ai ni accès à internet ni au réseau téléphonique. Cela est un véritable souci pour trouver une adresse ou appeler l’opérateur téléphonique.
Je fais une petite erreur de parcours, j’arrive à Castlerock et je passe devant un camping. Quelle chance !
Le réceptionniste m’offre la gratuité du camping. Il formule : « Bienvenue en Irlande du Nord ! Profitez seulement d’un bon moment dans notre camping ! »
Quelle gentillesse ! C’est de bon augure pour la suite de mon voyage dans son pays.
Mardi 12 août - 42e jour
75 km /
Magilligan-Point / Castlerock
La première partie de cette journée, réalisée en République d'Irlande, est écrite sur la section 7.
Dès la descente du ferry, à Magilligan-Point j’aperçois une vaste plage. Elle accueille les familles et les promeneurs. Le soleil est là, faisant scintiller le sable doré. La mer d’un bleu turquoise appelle à la baignade.
Guère de changement d’un côté à l’autre de la frontière qui n’est matérialisée par aucun panneau. Sauf que maintenant, je dois compter en miles, acres, onces et payer en livres.
À ma gauche, séparée par un espace herbeux, une piste cyclable vient d’être asphaltée. Des poteaux en bois et des rouleaux de grillage sont posés au sol attendant la construction d’une séparation. Je m’engage sur la piste. Je pédale allègrement, ravie de ne pas rouler sur la route. Au loin, j’aperçois des tracteurs arrêtés sur cette voie. Puis l’un vient dans ma direction. Un homme en descend et se précipite vers moi.
Il m’explique brièvement : « Vous êtes en zone strictement interdite ! Il faut vite regagner la route ! » Il fait un geste avec bras et main pour imiter un fusil. Je n’y comprends rien ! Mais rien de rien !
Il s’empare de mon vélo, essaie de le porter pour lui faire franchir le talus, car maintenant la piste est surélevée par rapport à la route. Il se rend compte qu’on ne porte pas facilement ce vélo de presque cinquante kilogrammes. Pourtant c’est un homme très costaud. Et nous voici dévalant le talus, lui à l’avant du vélo tenant le guidon et moi, à l’arrière, accrochée au porte-bagages pour éviter que la bicyclette ne s’emballe.
À mon expression, il se rend compte que je suis apeurée par toute cette agitation et ce geste imitant un coup de fusil, et il poursuit : « C’est une zone militaire, vous pouvez emprunter la route, mais n’en sortez pas ! »
Je ne pédale plus allègrement, mais à toute vitesse ! Progressivement, je remarque que la voie que j’imaginais être une piste cyclable se perd dans les méandres d’un terrain derrière le grillage qui a été installé.
Je vois à présent de hauts grillages de chaque côté de la route sur lesquels, tous les trente mètres, des panneaux indiquent : « Zone militaire ! Interdiction ! »
Plongée dans les conversions de miles en kilomètres ne les aurais-je pas vus lorsque je me suis engagée sur la petite piste ! Toujours est-il qu’il m’a été facile de franchir une largeur d’un mètre d’herbe.
Puis je longe un haut mur de béton. Je me demande bien ce que l’armée peut cacher là derrière !
Je l’apprendrai ce soir au camping. C’est une prison ! La prison de Magilligan. Elle a ouvert ses portes en 1972 pour cinquante internés républicains irlandais et comprenait huit baraquements sur le site d’un camp militaire.
En 1976, le mur de la prison a été construit et la prison a commencé à accueillir d'autres détenus condamnés pour d’autres infractions. Magilligan est ainsi devenue une prison « normale » au regard des prisons d'Irlande du Nord. Le régime de la prison a donc été adapté en conséquence.
La prison a actuellement une capacité d'accueil de cinq-cent-soixante-huit détenus. Il s'agit d'une prison de sécurité moyenne qui accueille des détenus de sexe masculin ayant six ans ou moins de prison à purger et répondant aux critères de sécurité requis.
En 2017, la prison de Magilligan s'est avérée être la prison la plus performante d'Irlande du Nord, selon une inspection inopinée du service de justice pénale.
Je n’ai pas escaladé de grillage, mais il est manifeste que j’ai a priori enfreint la loi ! Mais comment pouvais-je le savoir ?
La prison de Magilligan ! Je m’en souviendrai ! Car à cet endroit, un militaire en civil m’a effrayée dans sa précipitation à me remettre dans le bon chemin.
Après cela, je traverse une vaste zone de culture ; je longe la côte et ses plages à n’en plus finir ; je fais une brève apparition dans un camping-ville avec camping-cars, caravanes, immenses tentes et animations en tout genre.
Je poursuis ma route et sur une piste cyclable, en bordure d’une nationale, je m’arrête auprès de Claudine et Jean-Jacques, toulousains et cyclo-voyageurs. Rencontre trop brève ! Cela faisait longtemps que je n’avais pas croisé de congénères à vélo. Cela me manquait ! Ils sont retraités comme moi. Claudine s’adonne au cyclo-voyage depuis moins longtemps que Jean-Jacques. D’après notre échange, nous avons les mêmes compétences dans les côtes. Jean-Jacques est allé au cap Nord, dans les Balkans aussi. C’est un vrai de vrai ! Enfin ! S’il a fait les pays au sud du Danube, j’ai fait en quelque sorte les pays au nord du Danube. Mais ils n’ont pas un nom d’ensemble. Cela fait moins rêver !
Puis ils partent à la ville-camping. Et moi je vais tâcher de trouver le camping indiqué par un panneau au bord de la route. Mais je n’y arriverai pas après avoir fait une multitude de kilomètres.
Depuis la frontière, je n’ai ni accès à internet ni au réseau téléphonique. Cela est un véritable souci pour trouver une adresse ou appeler l’opérateur téléphonique.
Je fais une petite erreur de parcours, j’arrive à Castlerock et je passe devant un camping. Quelle chance !
Le réceptionniste m’offre la gratuité du camping. Il formule : « Bienvenue en Irlande du Nord ! Profitez seulement d’un bon moment dans notre camping ! »
Quelle gentillesse ! C’est de bon augure pour la suite de mon voyage dans son pays.
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Mercredi 13 août - 43e jour
50 km /
Castlerock / Busmhills
Pendant mon parcours en Irlande du Nord je vais essentiellement circuler sur l’A2 qui est une route majeure. Principalement à une seule voie dans chaque sens, cette route longe la partie la plus importante du littoral nord-irlandais.
Je traverse Coleraine située près de l’embouchure de la rivière Bann. Un magasin de sport m’arrête. J’achète des gants car j’en ai perdu un. Je ne comprends pas comment j’ai pu le perdre ! Ils me sont indispensables pour tenir les poignées et me protéger les mains durant de nombreuses heures quotidiennes.
Aujourd’hui, sur presque cinquante kilomètres, je circule essentiellement sur des trottoirs. Le soleil me brûle la peau et il est très fatigant de pédaler lorsque la chaleur est intense.
La région est très touristique. Le sable blanc d’immenses plages scintille au soleil. Cette carte postale me rappelle que dans les années soixante, il n’y avait qu’un pas à faire pour plonger dans la riviera adriatique à Rimini, lorsque nous rendions visite à mes grands-parents à San Leo dans les douces collines des Appenins.
À Portstewart, les restaurants côtoient les glaciers. À Portrush, la plage n’en finit pas.
Coup de pédale après coup de pédale, les kilomètres défilent et je parviens en haut de falaises aux points de vue qui m’offrent un spectacle éblouissant.
Parfois des bus déversent un flot de passagers. Après un coup d’œil, ils repartent, laissant le site silencieux.
À un point de vue, une table me permet de pique-niquer. Je ressens le besoin de dormir… Incontestablement je ne dors pas assez ! Dès la tête posée sur mes bras, je m’assoupis et je suis réveillée sitôt après par un couple de personnes âgées qui me demandent s’ils peuvent pique-niquer à ma table.
J’arrive à Busmhills. De nombreuses personnes sont assises où elles peuvent, sur des bancs pour les mieux lotis, sur les rebords des jardinières ou des fenêtres pour les autres. Ils dégustent des glaces. Je fais, moi aussi, une halte chez le glacier et savoure cette délicieuse douceur sucrée.
À l’auberge des voyageurs. La réceptionniste m’installe dans une chambre à six lits, dont deux sont disposés sur une mezzanine. Je partage le dortoir avec Avery, cycliste américaine. Elle est partie de Belfast pour la Chaussée des Géants qu’elle a visitée aujourd’hui. Ce sera mon objectif de demain.
50 km /
Castlerock / Busmhills
Pendant mon parcours en Irlande du Nord je vais essentiellement circuler sur l’A2 qui est une route majeure. Principalement à une seule voie dans chaque sens, cette route longe la partie la plus importante du littoral nord-irlandais.
Je traverse Coleraine située près de l’embouchure de la rivière Bann. Un magasin de sport m’arrête. J’achète des gants car j’en ai perdu un. Je ne comprends pas comment j’ai pu le perdre ! Ils me sont indispensables pour tenir les poignées et me protéger les mains durant de nombreuses heures quotidiennes.
Aujourd’hui, sur presque cinquante kilomètres, je circule essentiellement sur des trottoirs. Le soleil me brûle la peau et il est très fatigant de pédaler lorsque la chaleur est intense.
La région est très touristique. Le sable blanc d’immenses plages scintille au soleil. Cette carte postale me rappelle que dans les années soixante, il n’y avait qu’un pas à faire pour plonger dans la riviera adriatique à Rimini, lorsque nous rendions visite à mes grands-parents à San Leo dans les douces collines des Appenins.
À Portstewart, les restaurants côtoient les glaciers. À Portrush, la plage n’en finit pas.
Coup de pédale après coup de pédale, les kilomètres défilent et je parviens en haut de falaises aux points de vue qui m’offrent un spectacle éblouissant.
Parfois des bus déversent un flot de passagers. Après un coup d’œil, ils repartent, laissant le site silencieux.
À un point de vue, une table me permet de pique-niquer. Je ressens le besoin de dormir… Incontestablement je ne dors pas assez ! Dès la tête posée sur mes bras, je m’assoupis et je suis réveillée sitôt après par un couple de personnes âgées qui me demandent s’ils peuvent pique-niquer à ma table.
J’arrive à Busmhills. De nombreuses personnes sont assises où elles peuvent, sur des bancs pour les mieux lotis, sur les rebords des jardinières ou des fenêtres pour les autres. Ils dégustent des glaces. Je fais, moi aussi, une halte chez le glacier et savoure cette délicieuse douceur sucrée.
À l’auberge des voyageurs. La réceptionniste m’installe dans une chambre à six lits, dont deux sont disposés sur une mezzanine. Je partage le dortoir avec Avery, cycliste américaine. Elle est partie de Belfast pour la Chaussée des Géants qu’elle a visitée aujourd’hui. Ce sera mon objectif de demain.
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Jeudi 14 août / 44e jour
20 km
La Chaussée des Géants
La Chaussée des Géants est située à trois kilomètres de la ville de Bushmills.
Pas de chance ! Je pédale dans un brouillard à couper au couteau. J’espère qu’il se lèvera !
Sitôt arrivée, j’accroche ma bicyclette chargée de ses sacoches à un arceau placé devant le Causeway Hôtel restaurant du site.
Je prends le chemin goudronné qui descend vers la célèbre Chaussée. Il est huit heures. Le site est splendide et serein. Il est classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, car au-delà de sa beauté extraordinaire, la Chaussée est un portail vers le passé le plus ancien de la Terre.
La chaussée des Géants est une formation volcanique. Elle se caractérise par environ quarante-mille colonnes de lave refroidie : orgues basaltiques, hexagonales, verticales et juxtaposées. L'ensemble érodé par l'action de la mer, évoque un pavage qui débute de la base de la falaise et disparaît dans la mer. Les colonnes sont visibles sur l’estran et forment aussi une falaise haute de vingt-huit mètres.
Ici, la lumière peut changer tout au long de la journée, avec une beauté exceptionnelle allant du vert vif au gris en passant par une couleur tabac, plus chaude.
Endroit vraiment unique ! C’est absolument saisissant !
En observant ces pavés géants enveloppés sous la brume irlandaise, je me mets à croire à la légende qui en fait l’œuvre d’un colosse. La légende prend forme en fin de journée.
Je poursuis un sentier de terre d’un bon mètre de large accroché à la falaise. Puis j’entends des exclamations, un embrouillamini de conversations… la beauté de la langue italienne si riche en voyelles. Et au détour de la falaise, ils se dévoilent. Ils sont huit accrochés aux orgues. Les grands-parents, les parents, les petits-enfants. Voici ce que je comprends : « On ne me voit pas la tête ! On ne me voit pas du tout ! » Un des adolescents repositionne le téléphone sur un trépied de vingt centimètres de haut et court s’accrocher au côté de la famille. Puis je les laisse et dans mon dos, je les entends : « Dieci, nove, otto… » Une famille bien vivante et avec un trépied dont j’aurais aussi bien besoin.
J’arrive où le sentier s’arrête, fermé par une barrière depuis 1995. Ceci dû à l’érosion. La balade y est devenue trop dangereuse pour les visiteurs.
La nature a repris ses droits. Le sentier est devenu bosselé, il s’est recouvert d’herbe. D’ici quelque temps il disparaîtra totalement du flanc de la montagne.
Je termine la promenade par les marches de pierres de Shepherd’s Steps. Elles rejoignent un sentier qui suit le haut des falaises et ramène au Visitor Centre.
Accroché à la poignée de mon guidon, une surprise m’attend. Un cœur de tissu fait main ! Une carte de visite précise sa provenance.
Voilà ce que j’ai trouvé sur Internet. Bienvenue sur : J'ai trouvé un cœur matelassé !
Avez-vous trouvé un cœur matelassé ?
Si oui, il est destiné à être le vôtre ! Offrez-lui un foyer. Les Trois Sœurs seraient ravies de connaître l'histoire de votre cœur matelassé. »
« Cette association a pour but de promouvoir la création et la diffusion de spectacle vivant et cinématographique, de sensibiliser un public le plus large possible par le biais d'ateliers, stages, cours de formation professionnelles et de favoriser les échanges culturels au niveau européen et mondial. »
Je suppose que c’est ça ! Mais… Serait-ce du prosélytisme à travers le monde ?
Je profite du confort du restaurant pour prendre un en-cas et écrire. J’attends la fin de la journée pour observer sous une autre lumière la Chaussée des Géants.
Mais tout au cours de la journée des bus déversent des centaines de touristes. Je reprends donc la route en fin d’après-midi sans être retournée sur le site.
Je parcours quinze kilomètres et rejoins un camping à la ferme fort rustique.
La Chaussée des Géants tire son nom d’une légende ancestrale. Effectivement, cette vaste étendue de colonnes basaltiques serrées les unes contre les autres, semble avoir été façonnée par des titans. Voici la légende que racontent les anciens.
« Il était une fois deux géants, Fionn Mac Cumhaill et Benandonner, qui vivaient de chaque côté de la mer, l’un en Irlande et l’autre en Écosse.
Le géant écossais, jaloux et colérique, défia un jour son rival irlandais. Fou de rage et voulant montrer sa bravoure, le géant irlandais entreprit de franchir les 30 km qui les séparaient en jetant des pierres dans la mer pour construire une « chaussée » praticable reliant les deux contrées. Mais quelle ne fut pas sa surprise en apercevant son rival écossais ! Ce géant était… gigantesque ! Pris de panique, le colosse rebroussa chemin et élabora une ruse avec sa femme : il se déguisa en bébé. Quand Benandonner, à son tour aperçut ce bébé, il prit peur en imaginant la taille et la puissance que pouvait avoir son géant de père. Affolé, il battit en retraite en Écosse en prenant soin de démonter la chaussée, engloutie sous les eaux, ne laissant immergées que les extrémités de ce pavement : la Chaussée des Géants en Irlande et les colonnes de l’île de Staffa en Écosse. »
20 km
La Chaussée des Géants
La Chaussée des Géants est située à trois kilomètres de la ville de Bushmills.
Pas de chance ! Je pédale dans un brouillard à couper au couteau. J’espère qu’il se lèvera !
Sitôt arrivée, j’accroche ma bicyclette chargée de ses sacoches à un arceau placé devant le Causeway Hôtel restaurant du site.
Je prends le chemin goudronné qui descend vers la célèbre Chaussée. Il est huit heures. Le site est splendide et serein. Il est classé au patrimoine mondial de l'UNESCO, car au-delà de sa beauté extraordinaire, la Chaussée est un portail vers le passé le plus ancien de la Terre.
La chaussée des Géants est une formation volcanique. Elle se caractérise par environ quarante-mille colonnes de lave refroidie : orgues basaltiques, hexagonales, verticales et juxtaposées. L'ensemble érodé par l'action de la mer, évoque un pavage qui débute de la base de la falaise et disparaît dans la mer. Les colonnes sont visibles sur l’estran et forment aussi une falaise haute de vingt-huit mètres.
Ici, la lumière peut changer tout au long de la journée, avec une beauté exceptionnelle allant du vert vif au gris en passant par une couleur tabac, plus chaude.
Endroit vraiment unique ! C’est absolument saisissant !
En observant ces pavés géants enveloppés sous la brume irlandaise, je me mets à croire à la légende qui en fait l’œuvre d’un colosse. La légende prend forme en fin de journée.
Je poursuis un sentier de terre d’un bon mètre de large accroché à la falaise. Puis j’entends des exclamations, un embrouillamini de conversations… la beauté de la langue italienne si riche en voyelles. Et au détour de la falaise, ils se dévoilent. Ils sont huit accrochés aux orgues. Les grands-parents, les parents, les petits-enfants. Voici ce que je comprends : « On ne me voit pas la tête ! On ne me voit pas du tout ! » Un des adolescents repositionne le téléphone sur un trépied de vingt centimètres de haut et court s’accrocher au côté de la famille. Puis je les laisse et dans mon dos, je les entends : « Dieci, nove, otto… » Une famille bien vivante et avec un trépied dont j’aurais aussi bien besoin.
J’arrive où le sentier s’arrête, fermé par une barrière depuis 1995. Ceci dû à l’érosion. La balade y est devenue trop dangereuse pour les visiteurs.
La nature a repris ses droits. Le sentier est devenu bosselé, il s’est recouvert d’herbe. D’ici quelque temps il disparaîtra totalement du flanc de la montagne.
Je termine la promenade par les marches de pierres de Shepherd’s Steps. Elles rejoignent un sentier qui suit le haut des falaises et ramène au Visitor Centre.
Accroché à la poignée de mon guidon, une surprise m’attend. Un cœur de tissu fait main ! Une carte de visite précise sa provenance.
Voilà ce que j’ai trouvé sur Internet. Bienvenue sur : J'ai trouvé un cœur matelassé !
Avez-vous trouvé un cœur matelassé ?
Si oui, il est destiné à être le vôtre ! Offrez-lui un foyer. Les Trois Sœurs seraient ravies de connaître l'histoire de votre cœur matelassé. »
« Cette association a pour but de promouvoir la création et la diffusion de spectacle vivant et cinématographique, de sensibiliser un public le plus large possible par le biais d'ateliers, stages, cours de formation professionnelles et de favoriser les échanges culturels au niveau européen et mondial. »
Je suppose que c’est ça ! Mais… Serait-ce du prosélytisme à travers le monde ?
Je profite du confort du restaurant pour prendre un en-cas et écrire. J’attends la fin de la journée pour observer sous une autre lumière la Chaussée des Géants.
Mais tout au cours de la journée des bus déversent des centaines de touristes. Je reprends donc la route en fin d’après-midi sans être retournée sur le site.
Je parcours quinze kilomètres et rejoins un camping à la ferme fort rustique.
La Chaussée des Géants tire son nom d’une légende ancestrale. Effectivement, cette vaste étendue de colonnes basaltiques serrées les unes contre les autres, semble avoir été façonnée par des titans. Voici la légende que racontent les anciens.
« Il était une fois deux géants, Fionn Mac Cumhaill et Benandonner, qui vivaient de chaque côté de la mer, l’un en Irlande et l’autre en Écosse.
Le géant écossais, jaloux et colérique, défia un jour son rival irlandais. Fou de rage et voulant montrer sa bravoure, le géant irlandais entreprit de franchir les 30 km qui les séparaient en jetant des pierres dans la mer pour construire une « chaussée » praticable reliant les deux contrées. Mais quelle ne fut pas sa surprise en apercevant son rival écossais ! Ce géant était… gigantesque ! Pris de panique, le colosse rebroussa chemin et élabora une ruse avec sa femme : il se déguisa en bébé. Quand Benandonner, à son tour aperçut ce bébé, il prit peur en imaginant la taille et la puissance que pouvait avoir son géant de père. Affolé, il battit en retraite en Écosse en prenant soin de démonter la chaussée, engloutie sous les eaux, ne laissant immergées que les extrémités de ce pavement : la Chaussée des Géants en Irlande et les colonnes de l’île de Staffa en Écosse. »
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Vendredi 15 août - 45e jour
40 km /
Dunseverick / Watertop Farm
Mon linge est encore dégoulinant. Je le fourre en boule dans un sac plastique en espérant trouver une machine électrique ce soir.
Je longe la côte, soit au niveau de la mer soit en la surplombant. Quelques pentes à pied puis vite descendues et j’arrive à Ballycastle.
J’ai l’intention de me rendre sur l’île de Rathlin Island où vivent une centaine de personnes sur ces quelques kilomètres carrés battus par les vents. L’île, sauvage et sans arbres, est ceinturée par de hautes falaises blanches et abrite la plus grande colonie d’oiseaux d’Irlande du Nord. L’île est parsemée de nombreux murets et de fermes en ruine. Cela va me plaire !
Hélas ! Aucune place n’est disponible sur le ferry, ni aujourd’hui ni demain. C’est la haute saison et je n’ai pas réservé, ce qui pour moi est impossible car je ne sais jamais à quel moment je serai à tel ou tel endroit.
Je flâne dans Ballycastle, station de villégiature agréable, doublée d’un bourg commerçant.
Dépitée, car je pensais observer des macareux pour la première fois de ma vie, je reprends la route.
À la sortie de la ville, de nombreux terrains de golf montrent leur gazon d’une qualité exceptionnelle, bien vert, compact, fin et luxuriant. Les gestes des golfeurs sont précis, leurs swings sont gracieux.
Après une quarantaine de kilomètres je rejoins un camping à la ferme. Parfois, de courtes étapes sont justifiées par la possibilité d’un hébergement, le seul possible à des kilomètres à la ronde.
Et quel camping !
Je m’installe sur le spacieux terrain de camping familial sur un emplacement entièrement équipé. Je fais connaissance avec mes voisins laineux qui broutent derrière le grillage. Deux génisses joueuses les accompagnent. Parfois ces dernières se mettent à gambader, à caracoler au milieu des moutons qui se dérobent de belle manière en se disséminant à travers le champ.
Une machine à laver est disponible pour assainir l’entièreté de mon linge. Un séchoir naturel sur grillage avec soleil et vent viennent à bout du séchage. L’image est belle ! Une petite tente vert bouteille et un vélo à ses côtés sont posés à l’avant du linge. Les taches de couleur sont fuchsia, bleues, vertes, jaunes, noires et s’élancent, s’élèvent, claquent, bien accrochées sur le fil et le grillage au fort vent d’Irlande.
Puis je pars à la découverte de la ferme.
La bavarde Madame McBride me prend en charge et raconte : « Notre famille exploite Watertop depuis que nos ancêtres ont quitté Fairhead, ville voisine, pour s'y installer au début des années 1900. Autrefois, nous étions une ferme mixte traditionnelle, trayant les vaches à la main et élevant des bovins et des moutons. Dans les années 1970, Patsy, mon mari, a commencé à diversifier la ferme en ouvrant d'abord nos portes comme centre de randonnées équestres, puis en la transformant progressivement en ferme ouverte. Ce fut la première ferme ouverte d’Irlande. Nous possédons six-cents moutons, dix vaches, deux chevaux et deux ânes. Les agneaux seront vendus la semaine prochaine. En ce moment mon fils tond les moutons, vous pouvez aller le regarder sous le hangar. Et enfin, profitez d'un peu de détente dans le musée du cottage. »
J’admire la dextérité de Cillian au cours de la tonte de plusieurs moutons. Ses gestes sont toujours identiques. Il immobilise l’animal en douceur. Le mouton est assis et calé entre ses jambes. Il suit un ordre de passage précis, en évitant les zones sensibles et travaille à un rythme maîtrisé. Néanmoins lorsqu’il le relâche, celui-ci file à toute allure, n’en demandant pas plus.
Le cottage-musée, logis traditionnel, abrite une vaste collection d'équipements et d'ustensiles agricoles traditionnels irlandais. J’y trouve également une cheminée et des meubles d'antan que je n’ose pas utiliser de crainte qu’ils ne s’effondrent.
Quelle belle soirée au sein de cette ferme ouverte et vivante… pour seulement dix euros !
40 km /
Dunseverick / Watertop Farm
Mon linge est encore dégoulinant. Je le fourre en boule dans un sac plastique en espérant trouver une machine électrique ce soir.
Je longe la côte, soit au niveau de la mer soit en la surplombant. Quelques pentes à pied puis vite descendues et j’arrive à Ballycastle.
J’ai l’intention de me rendre sur l’île de Rathlin Island où vivent une centaine de personnes sur ces quelques kilomètres carrés battus par les vents. L’île, sauvage et sans arbres, est ceinturée par de hautes falaises blanches et abrite la plus grande colonie d’oiseaux d’Irlande du Nord. L’île est parsemée de nombreux murets et de fermes en ruine. Cela va me plaire !
Hélas ! Aucune place n’est disponible sur le ferry, ni aujourd’hui ni demain. C’est la haute saison et je n’ai pas réservé, ce qui pour moi est impossible car je ne sais jamais à quel moment je serai à tel ou tel endroit.
Je flâne dans Ballycastle, station de villégiature agréable, doublée d’un bourg commerçant.
Dépitée, car je pensais observer des macareux pour la première fois de ma vie, je reprends la route.
À la sortie de la ville, de nombreux terrains de golf montrent leur gazon d’une qualité exceptionnelle, bien vert, compact, fin et luxuriant. Les gestes des golfeurs sont précis, leurs swings sont gracieux.
Après une quarantaine de kilomètres je rejoins un camping à la ferme. Parfois, de courtes étapes sont justifiées par la possibilité d’un hébergement, le seul possible à des kilomètres à la ronde.
Et quel camping !
Je m’installe sur le spacieux terrain de camping familial sur un emplacement entièrement équipé. Je fais connaissance avec mes voisins laineux qui broutent derrière le grillage. Deux génisses joueuses les accompagnent. Parfois ces dernières se mettent à gambader, à caracoler au milieu des moutons qui se dérobent de belle manière en se disséminant à travers le champ.
Une machine à laver est disponible pour assainir l’entièreté de mon linge. Un séchoir naturel sur grillage avec soleil et vent viennent à bout du séchage. L’image est belle ! Une petite tente vert bouteille et un vélo à ses côtés sont posés à l’avant du linge. Les taches de couleur sont fuchsia, bleues, vertes, jaunes, noires et s’élancent, s’élèvent, claquent, bien accrochées sur le fil et le grillage au fort vent d’Irlande.
Puis je pars à la découverte de la ferme.
La bavarde Madame McBride me prend en charge et raconte : « Notre famille exploite Watertop depuis que nos ancêtres ont quitté Fairhead, ville voisine, pour s'y installer au début des années 1900. Autrefois, nous étions une ferme mixte traditionnelle, trayant les vaches à la main et élevant des bovins et des moutons. Dans les années 1970, Patsy, mon mari, a commencé à diversifier la ferme en ouvrant d'abord nos portes comme centre de randonnées équestres, puis en la transformant progressivement en ferme ouverte. Ce fut la première ferme ouverte d’Irlande. Nous possédons six-cents moutons, dix vaches, deux chevaux et deux ânes. Les agneaux seront vendus la semaine prochaine. En ce moment mon fils tond les moutons, vous pouvez aller le regarder sous le hangar. Et enfin, profitez d'un peu de détente dans le musée du cottage. »
J’admire la dextérité de Cillian au cours de la tonte de plusieurs moutons. Ses gestes sont toujours identiques. Il immobilise l’animal en douceur. Le mouton est assis et calé entre ses jambes. Il suit un ordre de passage précis, en évitant les zones sensibles et travaille à un rythme maîtrisé. Néanmoins lorsqu’il le relâche, celui-ci file à toute allure, n’en demandant pas plus.
Le cottage-musée, logis traditionnel, abrite une vaste collection d'équipements et d'ustensiles agricoles traditionnels irlandais. J’y trouve également une cheminée et des meubles d'antan que je n’ose pas utiliser de crainte qu’ils ne s’effondrent.
Quelle belle soirée au sein de cette ferme ouverte et vivante… pour seulement dix euros !
…
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Samedi 16 août - 46e jour
56 km /
Watertop Farm / Larne
Le brouillard m’isole dans mon coin de camping. J’ai l’impression d’être seule au monde. Pourtant, à quelques mètres, Enea se prépare aussi à partir avec ses trois filles. Elles vivent en Écosse et rendent visite au grand-père paternel vivant en pleine campagne du côté de Limerick, sur la côte ouest de la République d’Irlande.
Tout est humide, la tente et mes effets de couchage. Peu à peu, le ciel d’un bleu intense apparaît.
Je vais revenir quelques kilomètres sur mes pas car des dames en vacances à Castlerock m’ont conseillé, photos à l’appui, de passer par les Glens d’Antrim, qui sont tout simplement les montagnes d'Antrim. Elles comprennent neuf montagnes (les glens) qui rayonnent depuis le plateau d'Antrim jusqu'à l’océan.
Les dames arguaient : « Les Glens possèdent une nature d'une exceptionnelle beauté, et ils constituent une attraction touristique majeure au nord d'Antrim. Les principales villes des Glens sont Ballycastle Cushendun. Ah Cushendun j’adore ! Et Cushendall, Waterfoot et Carnlough. »
Avec cette injonction, je ne peux passer outre. Les Glens m’appellent !
Très vite, je me rends compte que les dames n’ont jamais fait de vélo dans ces montagnes.
J’entends mon cœur chanter dans les côtes, à pied évidemment. Un petit arrêt de quelques secondes lui permet d’avoir moins d’enthousiasme.
Il me manque quelques séances de musculation pour me faciliter la tâche. Les virages deviennent des murs à franchir.
Dans les descentes, je marche et retiens mon vélo pour ne pas risquer d’endommager les freins. C’est quand même un comble !
Mais qu’est-ce qui m’a pris de vouloir rejoindre la côte par cette route ?
La route est extraordinaire vue du ciel. Mais au ras du sol… je ne peux que l’imaginer !
Puis je distingue un mirage devant moi ! Un cycliste de route ! Il s’arrête péniblement dans la descente et s’enquiert si tout va bien. Il m’annonce ce que je ne veux pas entendre : « Il en reste cinq ! » Cinq ! Je réalise que ce sont cinq miles, c’est à dire huit kilomètres. J’ai envie de pleurer ! D’accord ! Ne pas être fatiguée est une chose ! Mais forcer comme une titanide est presque impossible.
Décidément il faut avoir de la persévérance ! Je viens d’avoir un message de Paul, mon ami Canadien qui descend du cap Nord. Son moral est au plus bas ! Plusieurs rayons viennent encore de casser sur sa roue arrière, alors qu’elle a été changée avant-hier à Trondheim. Il a même pensé un court instant à rentrer au Canada. Pensée fugitive, vite contrariée par ce qu’il a écrit : « Il ne faut pas s’arrêter aux difficultés, aux aléas en cours de voyage. Il faut garder en mémoire les objectifs c’est cela l’essentiel. »
Un motard s’arrête également. Il s’interroge et veut savoir si tout va bien. En effet tout va bien ! Mais c’est très difficile avec une route à paroi abrupte ! Il me demande si je suis seule et lève le pouce pour me féliciter. Cette sollicitude me va droit au cœur et m’encourage.
Le Conor Pass du sud-ouest de l’Irlande me paraît, avec un peu de recul, plus aisé. Il grimpait progressivement.
Ici, je me confronte aux parois des falaises. Dès la descente, je vois la côte qui m’attend.
La route sinueuse est à flanc de coteau. Parfois elle se perd dans le lointain et les profondeurs. Je dois reconnaître que c’est absolument imposant, grandiose !
Lorsque j’arrive en haut de la plus haute falaise de ce parcours, je croise un petit tracteur. Je pédale tranquillement sur quelques mètres à faible dénivelé. L’agriculteur me fait signe, moi aussi. Et presque instantanément j’entends un effroyable bruit de ferraille. Je me retourne et voit une roue rebondir sur la route ! À quelques mètres près, j’aurais pu être percutée par cette roue qui finit son exploit telle une damnée en bas de la côte.
Enfin, il réussit à s’arrêter avec un tracteur à trois roues dont un des moyeux a laissé une profonde entaille dans l’asphalte sur une trentaine de mètres.
Un homme, tout chamboulé, descend du véhicule. Je m’approche de lui. Il exprime sa peur : « Heureusement que cela s’est produit après que je vous ai croisée ! Et par chance je n’ai pas quitté la route ! Le précipice est vertigineux ! Maintenant je vais chercher de l’aide à un kilomètre d’ici. »
Quelle chance pour lui ! Et pour moi !
J’arrive enfin à Cushendun après avoir battu un record. Il m’a fallu quatre heures pour parcourir douze kilomètres. J’éprouve une grande fierté d’avoir circulé avec mon vélo dans les montagnes d’Antrim. La route des Glens !
Petite pause gourmandise à Cushendun. Il me faut bien cela après toutes ces émotions !
Le village possède un petit port tout mignon, les ruines d’un château et de blancs cottages aux toits d’ardoises de style cornouaillais.
Je rejoins l’A2, qui, sans véritablement de relief, me permet d’avancer rapidement.
Il est dix-huit heures. À Glenmar, je m’arrête. La fête bat son plein. Je m’achète un en-cas et m’installe sous un chapiteau à une table au milieu des autochtones. Mon voisin m’explique : « C’est la fête de l’aviron qui regroupe des équipes de toute l’Irlande. Ma fille a concouru avec ses amies. »
Puis il s’intéresse à mon voyage. Ensuite, il m’indique : « J’ai construit ma maison à environ sept kilomètres d’ici. Elle a une jolie vue sur la mer et vous êtes la bienvenue si vous voulez planter la tente dans le jardin. »
Il me présente sa femme Janice, sa fille de quinze ans, Avie et Kristen son garçon de dix-huit ans. Daisy, couchée à ses pieds, est un basset, long et énorme… qui a l’air placide et affectueux.
Rob me montre des photos du jardin et de la maison.
Je reconnais en Rob les caractéristiques irlandaises. Il a la main sur le cœur et un grand sens de l’hospitalité.
Je parcours les sept kilomètres. Mon GPS me conduit jusqu’à une maison isolée, invisible depuis la route. Je ne la reconnais pas d’après les photos montrées par Rob. Mais le jardin est ressemblant. Je fais le tour de la maison. Elle me paraît un peu défraîchie et cela a l’air d’être un beau bazar à l’intérieur de la véranda. Puis une dame sort, fort surprise de ma présence.
Je lui explique que mon GPS m’a conduite chez elle et que je cherche la maison de Rob et de Janice au cinquante-cinq de la rue. Je lui précise toute l’histoire de ma rencontre avec cette famille à la fête de l’aviron à Glenmar. Elle ne connaît pas mes hôtes mais son adresse est au soixante-dix-huit.
Elle insiste, elle veut prendre sa voiture et me devancer afin de trouver l’adresse que je lui ai indiquée.
Ce n’est pas une véritable rue. C’est une route secondaire où sont disséminées des maisons éloignées les unes des autres et parfois invisibles de la route. Nous arrivons au cinquante-trois sans avoir repéré l’adresse en question. Cette dame est vraiment gentille, avenante, chaleureuse, aidante.
Une voiture arrive et tourne dans un chemin à trente mètres de nous. Puis nous voyons Rob arriver sur la route. Il me fait signe. La dame est soulagée. C’est une histoire invraisemblable qui se termine bien. Elle me tend la main pour me dire au revoir, prête à m’embrasser. Elle a toutes les caractéristiques de la gentillesse irlandaise. Et nous nous quittons.
Au bout d’un chemin bétonné d’une cinquantaine de mètres, j’arrive à la maison. La famille est déjà là, mais je rencontrerai exclusivement Rob.
Deux corps de bâtiment très longs sont reliés. Une maison impressionnante ! Rob me fait contourner le bâtiment revêtu de mélèze brûlé et de pierre pour arriver sur une immense terrasse côté salon et cuisine. Les façades, sur lesquelles donnent un immense espace de vie sont vitrées.
Rob annonce : « Il serait insensé de planter la tente dans le jardin alors que nous avons une chambre d’amis avec salle de bains. » Il m’installe dans la chambre avec une carafe d’eau, m’apporte des couvertures supplémentaires et des serviettes de bain. Il m’indique : « L’espace autour de la maison est vaste, vous pouvez vous promener. »
Ma rencontre avec Rob s’arrête là !
J’observe la chambre. Les murs sont peints en blanc. Le plafond cathédrale de cette pièce lui assure une hauteur étonnante. Le lit, très large, est couvert de six coussins couleur blanc et ocre. Une petite table ronde en marbre blanc est placée à côté du lit. Sur celle-ci est posée une grande lampe de chevet au pied Dame-Jeanne en verre soufflé transparent, surmonté d’un abat-jour en rotin, suffisamment léger pour ne pas perturber l’équilibre de la Dame-Jeanne.
Au-dessus du lit, de surface inégale, deux rosaces en fil de fer tressé, sont fixées au mur. Face au lit et à droite de la pièce, dans un renfoncement du mur, un placard est fermé par de hautes portes lisses couleur vert d’eau.
Le reste du mur est occupé par un vaste tableau d’art contemporain, aux couleurs adaptées à la pièce, blanc, beige, gris et noir.
Une psyché, posée à la perpendiculaire du tableau, reflète en partie l’œuvre qui, hélas, n’est pas signée. Une élégante étagère à deux plateaux expose quelques bibelots de grande finesse. J’apprendrai demain matin que le même matériau recouvre tous les sols de la maison. C’est un béton teinté de gris achromatique, coulé au sol et poli. Cela permet d’avoir une uniformité de sol sans joints.
La salle de bains, sobre, est ultra moderne.
L’un des corps de la maison est destiné à l’entrée en pierre, aux pièces de nuit, à la buanderie et peut-être, les pièces sont fermées, à un bureau et une bibliothèque. Une baie vitrée côté mer rajoute à la beauté de cet espace.
Toutes les pièces sont en enfilade et donnent sur un couloir d’une longueur invraisemblable, en partie vitré et embelli de deux œuvres. L’une est une peinture contemporaine aux couleurs chaudes, l’autre un tissage de grande taille de couleur neutre.
À plusieurs reprises Rob a exprimé que c’était lui qui avait construit la maison. Incontestablement c’est son œuvre !
Rob m’apparaît être un homme simple. Indubitablement c’est inexact !
56 km /
Watertop Farm / Larne
Le brouillard m’isole dans mon coin de camping. J’ai l’impression d’être seule au monde. Pourtant, à quelques mètres, Enea se prépare aussi à partir avec ses trois filles. Elles vivent en Écosse et rendent visite au grand-père paternel vivant en pleine campagne du côté de Limerick, sur la côte ouest de la République d’Irlande.
Tout est humide, la tente et mes effets de couchage. Peu à peu, le ciel d’un bleu intense apparaît.
Je vais revenir quelques kilomètres sur mes pas car des dames en vacances à Castlerock m’ont conseillé, photos à l’appui, de passer par les Glens d’Antrim, qui sont tout simplement les montagnes d'Antrim. Elles comprennent neuf montagnes (les glens) qui rayonnent depuis le plateau d'Antrim jusqu'à l’océan.
Les dames arguaient : « Les Glens possèdent une nature d'une exceptionnelle beauté, et ils constituent une attraction touristique majeure au nord d'Antrim. Les principales villes des Glens sont Ballycastle Cushendun. Ah Cushendun j’adore ! Et Cushendall, Waterfoot et Carnlough. »
Avec cette injonction, je ne peux passer outre. Les Glens m’appellent !
Très vite, je me rends compte que les dames n’ont jamais fait de vélo dans ces montagnes.
J’entends mon cœur chanter dans les côtes, à pied évidemment. Un petit arrêt de quelques secondes lui permet d’avoir moins d’enthousiasme.
Il me manque quelques séances de musculation pour me faciliter la tâche. Les virages deviennent des murs à franchir.
Dans les descentes, je marche et retiens mon vélo pour ne pas risquer d’endommager les freins. C’est quand même un comble !
Mais qu’est-ce qui m’a pris de vouloir rejoindre la côte par cette route ?
La route est extraordinaire vue du ciel. Mais au ras du sol… je ne peux que l’imaginer !
Puis je distingue un mirage devant moi ! Un cycliste de route ! Il s’arrête péniblement dans la descente et s’enquiert si tout va bien. Il m’annonce ce que je ne veux pas entendre : « Il en reste cinq ! » Cinq ! Je réalise que ce sont cinq miles, c’est à dire huit kilomètres. J’ai envie de pleurer ! D’accord ! Ne pas être fatiguée est une chose ! Mais forcer comme une titanide est presque impossible.
Décidément il faut avoir de la persévérance ! Je viens d’avoir un message de Paul, mon ami Canadien qui descend du cap Nord. Son moral est au plus bas ! Plusieurs rayons viennent encore de casser sur sa roue arrière, alors qu’elle a été changée avant-hier à Trondheim. Il a même pensé un court instant à rentrer au Canada. Pensée fugitive, vite contrariée par ce qu’il a écrit : « Il ne faut pas s’arrêter aux difficultés, aux aléas en cours de voyage. Il faut garder en mémoire les objectifs c’est cela l’essentiel. »
Un motard s’arrête également. Il s’interroge et veut savoir si tout va bien. En effet tout va bien ! Mais c’est très difficile avec une route à paroi abrupte ! Il me demande si je suis seule et lève le pouce pour me féliciter. Cette sollicitude me va droit au cœur et m’encourage.
Le Conor Pass du sud-ouest de l’Irlande me paraît, avec un peu de recul, plus aisé. Il grimpait progressivement.
Ici, je me confronte aux parois des falaises. Dès la descente, je vois la côte qui m’attend.
La route sinueuse est à flanc de coteau. Parfois elle se perd dans le lointain et les profondeurs. Je dois reconnaître que c’est absolument imposant, grandiose !
Lorsque j’arrive en haut de la plus haute falaise de ce parcours, je croise un petit tracteur. Je pédale tranquillement sur quelques mètres à faible dénivelé. L’agriculteur me fait signe, moi aussi. Et presque instantanément j’entends un effroyable bruit de ferraille. Je me retourne et voit une roue rebondir sur la route ! À quelques mètres près, j’aurais pu être percutée par cette roue qui finit son exploit telle une damnée en bas de la côte.
Enfin, il réussit à s’arrêter avec un tracteur à trois roues dont un des moyeux a laissé une profonde entaille dans l’asphalte sur une trentaine de mètres.
Un homme, tout chamboulé, descend du véhicule. Je m’approche de lui. Il exprime sa peur : « Heureusement que cela s’est produit après que je vous ai croisée ! Et par chance je n’ai pas quitté la route ! Le précipice est vertigineux ! Maintenant je vais chercher de l’aide à un kilomètre d’ici. »
Quelle chance pour lui ! Et pour moi !
J’arrive enfin à Cushendun après avoir battu un record. Il m’a fallu quatre heures pour parcourir douze kilomètres. J’éprouve une grande fierté d’avoir circulé avec mon vélo dans les montagnes d’Antrim. La route des Glens !
Petite pause gourmandise à Cushendun. Il me faut bien cela après toutes ces émotions !
Le village possède un petit port tout mignon, les ruines d’un château et de blancs cottages aux toits d’ardoises de style cornouaillais.
Je rejoins l’A2, qui, sans véritablement de relief, me permet d’avancer rapidement.
Il est dix-huit heures. À Glenmar, je m’arrête. La fête bat son plein. Je m’achète un en-cas et m’installe sous un chapiteau à une table au milieu des autochtones. Mon voisin m’explique : « C’est la fête de l’aviron qui regroupe des équipes de toute l’Irlande. Ma fille a concouru avec ses amies. »
Puis il s’intéresse à mon voyage. Ensuite, il m’indique : « J’ai construit ma maison à environ sept kilomètres d’ici. Elle a une jolie vue sur la mer et vous êtes la bienvenue si vous voulez planter la tente dans le jardin. »
Il me présente sa femme Janice, sa fille de quinze ans, Avie et Kristen son garçon de dix-huit ans. Daisy, couchée à ses pieds, est un basset, long et énorme… qui a l’air placide et affectueux.
Rob me montre des photos du jardin et de la maison.
Je reconnais en Rob les caractéristiques irlandaises. Il a la main sur le cœur et un grand sens de l’hospitalité.
Je parcours les sept kilomètres. Mon GPS me conduit jusqu’à une maison isolée, invisible depuis la route. Je ne la reconnais pas d’après les photos montrées par Rob. Mais le jardin est ressemblant. Je fais le tour de la maison. Elle me paraît un peu défraîchie et cela a l’air d’être un beau bazar à l’intérieur de la véranda. Puis une dame sort, fort surprise de ma présence.
Je lui explique que mon GPS m’a conduite chez elle et que je cherche la maison de Rob et de Janice au cinquante-cinq de la rue. Je lui précise toute l’histoire de ma rencontre avec cette famille à la fête de l’aviron à Glenmar. Elle ne connaît pas mes hôtes mais son adresse est au soixante-dix-huit.
Elle insiste, elle veut prendre sa voiture et me devancer afin de trouver l’adresse que je lui ai indiquée.
Ce n’est pas une véritable rue. C’est une route secondaire où sont disséminées des maisons éloignées les unes des autres et parfois invisibles de la route. Nous arrivons au cinquante-trois sans avoir repéré l’adresse en question. Cette dame est vraiment gentille, avenante, chaleureuse, aidante.
Une voiture arrive et tourne dans un chemin à trente mètres de nous. Puis nous voyons Rob arriver sur la route. Il me fait signe. La dame est soulagée. C’est une histoire invraisemblable qui se termine bien. Elle me tend la main pour me dire au revoir, prête à m’embrasser. Elle a toutes les caractéristiques de la gentillesse irlandaise. Et nous nous quittons.
Au bout d’un chemin bétonné d’une cinquantaine de mètres, j’arrive à la maison. La famille est déjà là, mais je rencontrerai exclusivement Rob.
Deux corps de bâtiment très longs sont reliés. Une maison impressionnante ! Rob me fait contourner le bâtiment revêtu de mélèze brûlé et de pierre pour arriver sur une immense terrasse côté salon et cuisine. Les façades, sur lesquelles donnent un immense espace de vie sont vitrées.
Rob annonce : « Il serait insensé de planter la tente dans le jardin alors que nous avons une chambre d’amis avec salle de bains. » Il m’installe dans la chambre avec une carafe d’eau, m’apporte des couvertures supplémentaires et des serviettes de bain. Il m’indique : « L’espace autour de la maison est vaste, vous pouvez vous promener. »
Ma rencontre avec Rob s’arrête là !
J’observe la chambre. Les murs sont peints en blanc. Le plafond cathédrale de cette pièce lui assure une hauteur étonnante. Le lit, très large, est couvert de six coussins couleur blanc et ocre. Une petite table ronde en marbre blanc est placée à côté du lit. Sur celle-ci est posée une grande lampe de chevet au pied Dame-Jeanne en verre soufflé transparent, surmonté d’un abat-jour en rotin, suffisamment léger pour ne pas perturber l’équilibre de la Dame-Jeanne.
Au-dessus du lit, de surface inégale, deux rosaces en fil de fer tressé, sont fixées au mur. Face au lit et à droite de la pièce, dans un renfoncement du mur, un placard est fermé par de hautes portes lisses couleur vert d’eau.
Le reste du mur est occupé par un vaste tableau d’art contemporain, aux couleurs adaptées à la pièce, blanc, beige, gris et noir.
Une psyché, posée à la perpendiculaire du tableau, reflète en partie l’œuvre qui, hélas, n’est pas signée. Une élégante étagère à deux plateaux expose quelques bibelots de grande finesse. J’apprendrai demain matin que le même matériau recouvre tous les sols de la maison. C’est un béton teinté de gris achromatique, coulé au sol et poli. Cela permet d’avoir une uniformité de sol sans joints.
La salle de bains, sobre, est ultra moderne.
L’un des corps de la maison est destiné à l’entrée en pierre, aux pièces de nuit, à la buanderie et peut-être, les pièces sont fermées, à un bureau et une bibliothèque. Une baie vitrée côté mer rajoute à la beauté de cet espace.
Toutes les pièces sont en enfilade et donnent sur un couloir d’une longueur invraisemblable, en partie vitré et embelli de deux œuvres. L’une est une peinture contemporaine aux couleurs chaudes, l’autre un tissage de grande taille de couleur neutre.
À plusieurs reprises Rob a exprimé que c’était lui qui avait construit la maison. Incontestablement c’est son œuvre !
Rob m’apparaît être un homme simple. Indubitablement c’est inexact !
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Dimanche 17 août - 47e jour
50 km / 310 m
… Larne, ferry, Ballyllumford, Millbay, Islandmagee, Belfast
Je me réveille bien avant la famille. Discrètement, je prépare tous mes bagages et les installe sur ma bicyclette. J’attends pour les remercier de leur gentille hospitalité.
Petit à petit la maison s’éveille. Janice vient s’asseoir à côté de moi sur le lit. Lorsque je lui demande si c’est elle l’artiste qui a réalisé les œuvres dans la maison, elle rit. Ou alors si c’est elle l’architecte, elle rit de plus belle. Elle me demande quelques précisions au sujet de mon voyage. Puis Rob passe dans le long couloir et nous invite à l’accompagner pour prendre le petit déjeuner. Janice prépare le café et me présente un petit pichet en porcelaine. Il contient du lait.
En Irlande, le café, le thé et le lait sont omniprésents. On trouve les machines pour ces boissons dans les supermarchés, les mini marchés, les épiceries, les stations-services.
Rob me prépare des céréales au lait. De délicieuses céréales ! J’aurais dû relever la marque !
La discussion va bon train. Lorsque Janice m’explique : « Avec le télescope posé devant la baie vitrée exposée côté mer, je vois au plus loin le ferry qui va et vient d’Écosse sur la mer d’Irlande. »
Je comprends qu’elle est le capitaine du bateau. Devant mon erreur d’interprétation, c’est l’hilarité générale.
Et la maison ! Elle a été construite il y a sept ans. Auparavant c’était le site d’un moulin à lin du XVIIe siècle. Persiste un long hangar utilisé en guise de garage où est entreposé un petit tracteur rouge, rutilant, appartenant autrefois aux parents de Janice. Le mur du hangar est cintré et a gardé sa configuration d’antan. L’ancienne meule verticale, la ribe, qui broyait le lin, a été conservée. Elle est devenue une œuvre dressée verticalement à l’entrée de la propriété.
J’apprendrai lors de ma visite à Belfast que la culture du lin en Irlande date de l’époque des Phéniciens. À tel point qu’au XVIIIe siècle, la ville de Belfast devint le plus important producteur de lin dans le monde.
Aujourd’hui, les fils sont achetés, majoritairement en Chine, puis tissés en Irlande afin de garantir le label du lin irlandais.
Les pierres de démolition de l’ancien moulin ont été conservées et ont servi à la construction de certaines parties de la nouvelle maison.
Rob a été à l’initiative de la conception et a travaillé en parallèle avec l’architecte et le constructeur. « Je connais tout de la maison, jusqu’à chaque passage de fils électriques ! » m’indique-t-il.
La conception met en valeur la vue sur la mer et la forêt, la magnifique façade en mélèze brûlé, l'exposition à la lumière, l'utilisation de matériaux naturels et l’immense avant-toit en bois sur deux côtés de la maison. Tout cela offre de vastes espaces de vie en extérieur.
La maison a été élue « Maison de l’année de toute l’Irlande en 2023 ». Janice me montre les différentes revues consacrées à la maison. Les magazines à visées architecturale, artistique et décorative présentent avec articles et photos la maison, ainsi que Rob et Janice. Ils sont absolument fiers. Et ravis de mon intérêt, car je suis sensible à l’architecture, aux matériaux. « C’est un trait de famille ! » leur indiqué-je.
Janice a un rendez-vous et elle s’en va. Rob n’est pas pressé en ce dimanche matin. La relation est facile, simple et conviviale. Depuis 2023, Rob est président de l’ICC Belfast, seul centre de congrès international d'Irlande du Nord. Il préside l’événementiel aussi bien dans le domaine de la musique que du théâtre.
Auparavant, Rob a dirigé une entreprise de services technologiques au service de grandes entreprises comme Eircom et Ryanair, où il a occupé également une fonction mondiale.
« J'ai grandi dans une cité HLM », confie Rob. Malgré tout, quelque chose au fond de lui est resté fiché dans la simplicité, la cordialité et la sincérité.
Il constate : « Je n’ai pas grandement amélioré mon Français depuis l’école ! » Nous sommes à peu près au même niveau. Lui en Français, moi en Anglais. Le traducteur nous est précieux. D’ailleurs, il objecte : « C’est un excellent outil d’échange, je ne l’avais jamais autant utilisé. » En effet, avec l’habitude, les conversations peuvent être soutenues. Il faut pour cela utiliser des mots-clés, parler distinctement et construire des phrases courtes.
Kristen, sympathique garçon au regard doux, est âgé de dix-huit ans. L’âge pour aller au pub. « Il est rentré tard cette nuit ! » m’informe son père. Hier, Evie, très gentille jeune fille de quinze ans, a gagné une médaille d’or au championnat d’aviron de mer, réunissant des équipes des deux Irlandes. Elle me montre délicatement ce trophée.
Rob propose que l’on s’installe sur la terrasse au côté de laquelle coule un ruisseau. Mais, pour moi, il est temps de partir.
Il va chercher une pompe pour gonfler les roues de mon vélo. De bonnes jantes et d’excellents pneus évitent ce genre de désagréments. Puis il m’offre biscuits et bonbons pour gagner en énergie pendant ma journée. Je refuse les sucreries !
Puis nous posons pour une séance photos avec la reine de la circonstance : la bicyclette. Evie et son père se placent derrière l’élue, puis Rob et moi, sans oublier Daisy qui nous suit partout et s’installe au pied du vélo.
Depuis la maison, un chemin caillouteux de cinquante mètres descend abruptement jusqu’à l’A2. Rob se saisit du vélo. Il est très surpris et observe : « La bicyclette est très lourde ! Elle a l’avantage de mieux résister aux appels d’air des voitures vous doublant. Son poids lui permet un bon ancrage au sol. »
Rob me souhaite un bon voyage et insiste sur la prudence car l’A2 est dangereuse. Il a su faire preuve d’amabilité, d’attention, de délicatesse et de gentillesse. Il a formulé à plusieurs reprises : « Le peuple irlandais doit être accueillant ! » Il l’est ! J’ai pu le constater quotidiennement.
Mon chemin reprend…
Pas pour longtemps car je m’arrête à Ballygally Beach. Je relève le bleu du ciel semblable à celui de la mer. Deux dames conversent assises sur des sièges vert-anis posés sur le sable blond. Elles sont seules sur l’immense plage. Au loin, dans la mer un cours de natation est donné à des personnes âgées. Là encore, leurs bouées vert-anis se détachent sur le bleu azur de la mer. Un joli espace détente est installé dans cette baie. Une cabane offre des boissons variées et des pâtisseries. Les tables sont en bois rectangulaires aux bancs fixés à celles-ci. Ce sont ces mêmes tables que l’on remarque partout ailleurs, résistantes à la pluie. Cordage, bouées et filets reposent au pied d’un cordyline.
Deux hommes, attablés, jouent aux échecs sans craindre les rayons du soleil. Quelques chaises longues permettent de contempler la baie.
Je traverse Larne, ville industrielle. C’est le principal port d’embarquement d’Irlande du Nord pour l’Écosse.
Mon étape est courte aujourd’hui, environ une cinquantaine de kilomètres jusqu’au camping situé à une dizaine de kilomètres au nord de Belfast.
Demain, un bus me conduira à Belfast. J’ai rendez-vous avec Stéphane, français habitant Belfast depuis vingt-cinq ans, pour une visite politique à pied de la capitale.
50 km / 310 m
… Larne, ferry, Ballyllumford, Millbay, Islandmagee, Belfast
Je me réveille bien avant la famille. Discrètement, je prépare tous mes bagages et les installe sur ma bicyclette. J’attends pour les remercier de leur gentille hospitalité.
Petit à petit la maison s’éveille. Janice vient s’asseoir à côté de moi sur le lit. Lorsque je lui demande si c’est elle l’artiste qui a réalisé les œuvres dans la maison, elle rit. Ou alors si c’est elle l’architecte, elle rit de plus belle. Elle me demande quelques précisions au sujet de mon voyage. Puis Rob passe dans le long couloir et nous invite à l’accompagner pour prendre le petit déjeuner. Janice prépare le café et me présente un petit pichet en porcelaine. Il contient du lait.
En Irlande, le café, le thé et le lait sont omniprésents. On trouve les machines pour ces boissons dans les supermarchés, les mini marchés, les épiceries, les stations-services.
Rob me prépare des céréales au lait. De délicieuses céréales ! J’aurais dû relever la marque !
La discussion va bon train. Lorsque Janice m’explique : « Avec le télescope posé devant la baie vitrée exposée côté mer, je vois au plus loin le ferry qui va et vient d’Écosse sur la mer d’Irlande. »
Je comprends qu’elle est le capitaine du bateau. Devant mon erreur d’interprétation, c’est l’hilarité générale.
Et la maison ! Elle a été construite il y a sept ans. Auparavant c’était le site d’un moulin à lin du XVIIe siècle. Persiste un long hangar utilisé en guise de garage où est entreposé un petit tracteur rouge, rutilant, appartenant autrefois aux parents de Janice. Le mur du hangar est cintré et a gardé sa configuration d’antan. L’ancienne meule verticale, la ribe, qui broyait le lin, a été conservée. Elle est devenue une œuvre dressée verticalement à l’entrée de la propriété.
J’apprendrai lors de ma visite à Belfast que la culture du lin en Irlande date de l’époque des Phéniciens. À tel point qu’au XVIIIe siècle, la ville de Belfast devint le plus important producteur de lin dans le monde.
Aujourd’hui, les fils sont achetés, majoritairement en Chine, puis tissés en Irlande afin de garantir le label du lin irlandais.
Les pierres de démolition de l’ancien moulin ont été conservées et ont servi à la construction de certaines parties de la nouvelle maison.
Rob a été à l’initiative de la conception et a travaillé en parallèle avec l’architecte et le constructeur. « Je connais tout de la maison, jusqu’à chaque passage de fils électriques ! » m’indique-t-il.
La conception met en valeur la vue sur la mer et la forêt, la magnifique façade en mélèze brûlé, l'exposition à la lumière, l'utilisation de matériaux naturels et l’immense avant-toit en bois sur deux côtés de la maison. Tout cela offre de vastes espaces de vie en extérieur.
La maison a été élue « Maison de l’année de toute l’Irlande en 2023 ». Janice me montre les différentes revues consacrées à la maison. Les magazines à visées architecturale, artistique et décorative présentent avec articles et photos la maison, ainsi que Rob et Janice. Ils sont absolument fiers. Et ravis de mon intérêt, car je suis sensible à l’architecture, aux matériaux. « C’est un trait de famille ! » leur indiqué-je.
Janice a un rendez-vous et elle s’en va. Rob n’est pas pressé en ce dimanche matin. La relation est facile, simple et conviviale. Depuis 2023, Rob est président de l’ICC Belfast, seul centre de congrès international d'Irlande du Nord. Il préside l’événementiel aussi bien dans le domaine de la musique que du théâtre.
Auparavant, Rob a dirigé une entreprise de services technologiques au service de grandes entreprises comme Eircom et Ryanair, où il a occupé également une fonction mondiale.
« J'ai grandi dans une cité HLM », confie Rob. Malgré tout, quelque chose au fond de lui est resté fiché dans la simplicité, la cordialité et la sincérité.
Il constate : « Je n’ai pas grandement amélioré mon Français depuis l’école ! » Nous sommes à peu près au même niveau. Lui en Français, moi en Anglais. Le traducteur nous est précieux. D’ailleurs, il objecte : « C’est un excellent outil d’échange, je ne l’avais jamais autant utilisé. » En effet, avec l’habitude, les conversations peuvent être soutenues. Il faut pour cela utiliser des mots-clés, parler distinctement et construire des phrases courtes.
Kristen, sympathique garçon au regard doux, est âgé de dix-huit ans. L’âge pour aller au pub. « Il est rentré tard cette nuit ! » m’informe son père. Hier, Evie, très gentille jeune fille de quinze ans, a gagné une médaille d’or au championnat d’aviron de mer, réunissant des équipes des deux Irlandes. Elle me montre délicatement ce trophée.
Rob propose que l’on s’installe sur la terrasse au côté de laquelle coule un ruisseau. Mais, pour moi, il est temps de partir.
Il va chercher une pompe pour gonfler les roues de mon vélo. De bonnes jantes et d’excellents pneus évitent ce genre de désagréments. Puis il m’offre biscuits et bonbons pour gagner en énergie pendant ma journée. Je refuse les sucreries !
Puis nous posons pour une séance photos avec la reine de la circonstance : la bicyclette. Evie et son père se placent derrière l’élue, puis Rob et moi, sans oublier Daisy qui nous suit partout et s’installe au pied du vélo.
Depuis la maison, un chemin caillouteux de cinquante mètres descend abruptement jusqu’à l’A2. Rob se saisit du vélo. Il est très surpris et observe : « La bicyclette est très lourde ! Elle a l’avantage de mieux résister aux appels d’air des voitures vous doublant. Son poids lui permet un bon ancrage au sol. »
Rob me souhaite un bon voyage et insiste sur la prudence car l’A2 est dangereuse. Il a su faire preuve d’amabilité, d’attention, de délicatesse et de gentillesse. Il a formulé à plusieurs reprises : « Le peuple irlandais doit être accueillant ! » Il l’est ! J’ai pu le constater quotidiennement.
Mon chemin reprend…
Pas pour longtemps car je m’arrête à Ballygally Beach. Je relève le bleu du ciel semblable à celui de la mer. Deux dames conversent assises sur des sièges vert-anis posés sur le sable blond. Elles sont seules sur l’immense plage. Au loin, dans la mer un cours de natation est donné à des personnes âgées. Là encore, leurs bouées vert-anis se détachent sur le bleu azur de la mer. Un joli espace détente est installé dans cette baie. Une cabane offre des boissons variées et des pâtisseries. Les tables sont en bois rectangulaires aux bancs fixés à celles-ci. Ce sont ces mêmes tables que l’on remarque partout ailleurs, résistantes à la pluie. Cordage, bouées et filets reposent au pied d’un cordyline.
Deux hommes, attablés, jouent aux échecs sans craindre les rayons du soleil. Quelques chaises longues permettent de contempler la baie.
Je traverse Larne, ville industrielle. C’est le principal port d’embarquement d’Irlande du Nord pour l’Écosse.
Mon étape est courte aujourd’hui, environ une cinquantaine de kilomètres jusqu’au camping situé à une dizaine de kilomètres au nord de Belfast.
Demain, un bus me conduira à Belfast. J’ai rendez-vous avec Stéphane, français habitant Belfast depuis vingt-cinq ans, pour une visite politique à pied de la capitale.

Section 8 : du 12 au 17 août