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Extraterrestre CA 21 : Le risque

par L'extraterrestre dans Billets et éditos 03 sept. 2010 mis à jour 14 mars 2017 4992 lecteurs Soyez le premier à commenter
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Le risque

Chronique publiée dans Carnets d'Aventures n°21.
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Encore une fois c’est en regardant les échanges qui peuvent s’enflammer sur le site du mag qu’est venue l’idée de ce billet sur le risque. En effet, un bon moyen de se faire « taper dessus » sur les forums est d’annoncer un projet un peu fou, comportant des éléments engagés. Typiquement un voyage en kayak qui comprend de grandes traversées. D’un certain côté, la prise de risques semble de plus en plus condamnée. On ne doit pas mettre en péril sa vie. Les raisons invoquées sont les coûts pour la société* (recherche de la victime, coût de prise en charge si blessé), ou retombées sur les pratiquants de l’activité en cas de problème (durcissement de la législation si accident**) ou l’inconscience. La dernière raison parait la plus intéressante si elle est fondée et argumentée. En effet, si un individu veut réaliser quelque chose qui paraît impossible ou très dangereux à d’autres pratiquants, alors ceux-ci peuvent « amener à la conscience » de la personne les difficultés qu’ils perçoivent. Et cette dernière, une fois informée, s’adaptera ou acceptera le risque. Mais si l’inconscience n’est utilisée que comme une insulte non constructive et stérile, alors il ne s’agit que d’un empiétement sur la liberté que chacun a de disposer de lui-même. Le niveau de risques accepté par chacun est forcément différent. Éclairer une personne sur les difficultés et les dangers, c’est très bien. La condamner si elle veut tout de même entreprendre ce que l’on juge dangereux alors qu’elle en est consciente et en assume les aléas est une grave entrave à la liberté. Ce débat a lieu aussi pour les activités de montagne (alpinisme, ski de randonnée, etc.) qui comportent en effet bien des dangers potentiels (dangers objectifs (liés à l’environnement) et autres), et fauchent de nombreuses personnes chaque année. Mais va-t-on interdire l’accès à la montagne pour autant ? Si une personne A juge que l’ascension que souhaite entreprendre B est trop risquée par rapport à sa perception et son acceptation des risques, doit-elle l’en empêcher ? Évidemment, si elle voit B arriver avec un matériel et une expérience manifestement inadaptés, elle se doit de l’informer de ce qui l’attend, « amener à la conscience » l’inconscient, mais ensuite, elle ne devrait pas lui imposer son jugement.
La législation qui interdit à tout va pour « protéger » sa population ne devrait-elle pas plutôt informer et responsabiliser. Car à commencer à interdire pour « protéger », on en vient à tout interdire. La navigation à plus de 300 m des côtes avec un engin de plage est interdite en France, mais on peut mourir dans la bande des 300 m lorsque souffle une tempête, ou lorsqu’on ne sait pas nager. Et une personne déresponsabilisée pourra, en toute légalité, naviguer avec son matelas gonflable dans la tempête. Faut-il alors interdire l’accès à la mer même à moins de 300 m ou faire prendre conscience des dangers et responsabiliser ?
Un autre aspect est de se demander pourquoi une personne va vouloir prendre des risques. La société, sécuritaire d’un côté, pousse au crime de l’autre. Les médias (au sens large : émissions et journaux TV, livres, presse, cinéma, etc.) surenchérissent de sensationnel, d’extrême (à en devenir ridicule), si bien que prendre des risques est une valeur forte de notre monde (et l’a toujours été). Je prends des risques, je les affronte, j’en sors victorieux, donc j’augmente ma « valeur » aux yeux d’autrui. Et là on touche du doigt toute l’ambiguïté du rapport au risque. Valorisé d’un côté, condamné de l’autre…
Comme d’habitude, la solution est dans l’équilibre. Ne pas trop valoriser la prise de risques pour ne pas envoyer au casse-pipe, informer objectivement, responsabiliser, faire prendre conscience des dangers, et laisser libre à chacun de vivre la vie qu’il a choisie.

L’extraterrestre

* Cyniquement, on pourrait dire que ce coût-là est complètement marginal par rapport aux revenus générés par l’industrie du risque (via ne serait-ce que le cinéma hollywoodien). À force de mettre la prise de risque sur un piédestal, et cela depuis la plus tendre enfance (dessins animés d’action), il ne faut s’étonner qu’il y ait quelques dommages collatéraux…
** Là, on peut simplement regretter la dérive de la société, qui déresponsabilise en interdisant plutôt que d’informer. C’est un mal tragique dont souffre notre monde, malheureusement…

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