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Premières fois La Fleur au guidon

Pas d'avenir sans plaisir ?

par La Rédac dans Éditos 26 mars 2023 mis à jour 05 avr. 2023 104 lecteurs Soyez le premier à commenter
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Pas d’avenir sans plaisir ?

Par Manon


Trente et un décembre 2022. Massif du Jura. Altitude 850 m. Nous fermons la porte de la maison et enfourchons nos VTT au petit matin, sacs au dos. Nous rejoignons le tracé de la GTJ (Grande Traversée du Jura) et l’empruntons plus ou moins fidèlement en direction du sud. Il fait doux, c’est agréable de rouler, le terrain est plutôt sec, la source du Doubs est magnifique et jaillit rageusement de son trou creusé dans la roche avant de se faufiler au milieu de la tourbière en de calmes et jolis méandres. Quelques mètres en amont, il a fallu contourner un énorme tas de neige à l’agonie, fabriquée artificiellement au pied de l’unique piste de ski alpin de Mouthe en prévision d’une saison d’hiver qui se fait attendre. Chemin faisant, nous consultons régulièrement la carte pour dénicher des sentiers plus joueurs pour nos VTT. 1200 m d’altitude, toujours pas le moindre névé. 16h, le soleil décline. Près de Chapelle-des- Bois, nous installons le bivouac, puis trinquons à la nouvelle année. La nuit est douce et la journée qui suit franchement chaude sous un soleil radieux. Mains, bras et oreilles nus, nous nous laissons griser par les quelques jolies monotraces.

De nombreuses pensées se bousculent dans nos esprits. Que faisons- nous là avec nos VTT ? C'est à ski que nous devrions glisser sur cette traversée à cette date ; le balisage dédié au ski de fond et aux raquettes, présent partout, ne cesse de nous le rappeler. Combien d’hivers encore pourrons-nous jouir de la neige dans les montagnes du Jura ? De quoi seront faites les années à venir ? Comment réduire encore plus notre impact, changer plus drastiquement nos modes de vie ? Comment rester positif et constructif et ne pas sombrer dans une forme de solastalgie ?

De tristes pensées qui tranchent radicalement avec le plaisir intense que nous éprouvons au même moment : cette chevauchée à travers des montagnes que nous aimons tant nous rend heureux, simplement heureux.

Sur le quai de la gare de Saint-Claude, dans la pénombre, nous attendons le train qui va nous ramener au point de départ. Deux heures plus tard, dans la nuit noire, il nous faut encore pédaler les derniers kilomètres qui séparent notre maison de la gare la plus proche, toujours aussi heureux : quel beau réveillon nous avons passé là ! Et si demain il fallait se contenter de ces virées à vélo ou à pied de la maison dans un rayon que seules nos forces musculaires permettent, nous en serions toujours aussi enchantés.

Finalement, nous avons de la chance : ce qui nous rend heureux participe en même temps à la construction de ce monde nouveau qu’il nous faut accélérer si l’on veut s’en tirer. Une toute petite pierre à l’édifice certes, mais une pierre quand même, car sans plaisir, pas d’avenir ...

 

Pas d'avenir sans plaisir ?
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