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L'improbable voyage à vélo de Besançon au cap Nord en 2022.

(réalisé)
     
À Caroline ma fille et à Gaël mon petit-fils,     
  
De Besançon au cap Nord… Chiche !
 

Besançon – le cap Nord…
   Partir en solitaire, un défi pour un si long voyage à vélo !
  Il faut donc relever la bravade par un premier coup de pédale. Mes premiers voyages de cinq-cents kilomètres, qu’aujourd’hui je considère comme de courtes distances, m’ont fait découvrir ce qui m’apportait de l’étonnement, de multiples surprises et surtout, ce qui me procurait un véritable sentiment de liberté. Au fur et à mesure, j’ai allongé ces dernières années mes périples avec parfois une impression de frustration. À mon retour, ce n’était jamais assez…
   Celui-ci sera le plus long, le plus ambitieux que j’aurai entrepris ! 
  Toutes mes pérégrinations à vélo ont été l’occasion de faire des rencontres magiques, de découvrir des paysages magnifiques, de vivre des surprises émouvantes. Quand je pédale, j’éprouve un grand sentiment de liberté. Je deviens philosophe, poète, artiste.
   Je partage mes réflexions et mes sentiments, mes efforts aussi, avec les cyclotouristes qui m’accompagnent quelquefois sur des dizaines de kilomètres. Certains me disent que croiser une dame de mon âge, j’ai soixante-huit ans, seule, à vélo, partant si loin, les aide et les motive. Moi aussi je suis très enthousiaste et je continue, le nez au vent et les sourires dans mon baluchon. 
   Mais le plus amusant et flatteur aussi, je l’avoue, c’est de lire dans le regard de certains l’étonnement, l’admiration et le respect. Parfois même, on me perçoit comme une personne « perchée à l’âme romantique ». Mais tous font preuve d’humanité. Ils sont accueillants, aimables, généreux et surtout émerveillés !
   Certaines amies m’ont attribué le terme de « jeunior ». D’autres sont subjuguées. Rares sont celles qui me regardent d’un air circonspect voire dubitatif. Ma fille Caroline, qui sait que je ne suis pas une personne éthérée et que je n’outrepasserai pas mes capacités physiques, me fait confiance et c’est important. De cette façon, je pars tranquille pour ce long voyage, l’esprit léger.
   Quant à Gaël, mon petit-fils, adepte de cyclotourisme depuis nos échappées complices, il sera penché sur les cartes, à tracer mon parcours et à dessiner des campings et des restaurants.
   Mais je sais qu’au fond de lui, il aimerait partir avec moi pour pouvoir cueillir les cadeaux comme autant de fleurs magiques parce qu’il est sûr que je vais rencontrer le père Noël au cap Nord !
   Enfin, pour mon retour, fin août 2022, lorsque je prendrai l’avion à Alta en Norvège, mes sacoches, mon cœur, ma tête, mes jambes aussi, seront sans doute pleins de souvenirs, de rencontres, de paysages, de saines fatigues qui me rendront heureuse et fière d’avoir fait ce que j’aurai fait en trois mois. 
vélo de randonnée
Quand : 15/05/22
Durée : 94 jours
Distance globale : 5638km
Dénivelées : +26238m / -26332m
Alti min/max : -1m/488m
Carnet publié par Jacqueline25 le 09 mai 2022
modifié le 14 avr. 2023
5926 lecteur(s) -
Vue d'ensemble

Le topo : Section 11. Du 3 juillet au 8 j.. (mise à jour : 05 janv.)

Distance section : 376km
Dénivelées section : +3862m / -3854m
Section Alti min/max : 0m/488m

Description :

Førde / Ramsdal / Florø / Selje

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Le compte-rendu : Section 11. Du 3 juillet au 8 j.. (mise à jour : 05 janv.)

Dimanche 3 juillet – 50e jour
Førde / Ramsdal / Florø / Selje – 70 km + 80 km


Les rencontres fondamentales
 
   De nombreux tunnels jalonnent mon étape d’aujourd’hui. Le tunnel à la sortie de la ville est aussi interdit aux vélos. Donc, on ne peut ni entrer et ni sortir de cette ville à vélo. La journée balbutie à peine et je saute dans un bus qui me dépose peu après le tunnel.
   À mon arrivée à Florø je me rends à son joli camping tout en terrasses. Comme, pour les derniers kilomètres pluvieux je n’ai pas pris la peine de me couvrir de mes vêtements imperméables, j’y arrive sous dix degrés, frigorifiée et trempée jusqu’aux os.
   De petits chalets sont installés au milieu des arbres. La vue donne sur la mer. Je suis accueillie par Hadrien qui m’offre un café démesuré.
   Mes étapes à venir me causent un peu d’effroi. Les dénivelés oscillent entre deux-mille et deux-mille-cinq-cents mètres pour des parcours de quatre-vingts kilomètres. Je décide donc de prendre le ferry en fin de journée. Le gentil Hadrien m’indique les horaires et m’emmène dans sa Tesla pour repérer l’embarcadère, car il est difficile à trouver. 
   Lorsque je lui dis que j’ai tout le confort en France, une maison, une voiture dans le garage, une caravane, des amis, une famille et que je suis ici en habit de vélo à pédaler dans les montagnes des fjords, sous la pluie et le froid de surcroît depuis plusieurs jours, il hurle de rire !
   J’attends une bonne partie de l’après-midi dans la petite salle à manger du camping. J’en profite pour passer mon vélo à la douche. Le parcours sableux et réprouvé d’hier m’y oblige ; j’huile la chaîne et vérifie quelques serrages, je démonte et remonte le câblage de la dynamo qui n’alimente plus mon éclairage. J’ai dû l’endommager au cours de mon passage périlleux de la veille dans le tunnel. Ouf ! ça fonctionne à nouveau.
   Un monsieur allemand, Harald, camping-cariste, prend le temps de discuter avec moi. Après être passé par la Suède, il pêche le saumon dans la mer norvégienne. Il connaît bien les dénivelés qui m’attendent et me propose une recherche de voyage avec l’Hurtigruten (service régulier de navires côtiers). Je perçois qu’il est inquiet pour moi. Il m’envisage plus comme croisiériste, qu’à vélo sur les routes norvégiennes.
   Merci à Hadrien, à Harald pour leur sollicitude à mon égard. 
   Ça m’a manqué ces derniers jours depuis qu’esseulée, je pédale au-dessus des fjords norvégiens. Quelques heures plus tard à l’embarcadère… j’attends toujours mon ferry. L’information d’Hadrien n’était pas la bonne. Le ferry repartait pour Bergen. Quant à l’Hurtigruten il n’arrive pas avant le milieu de la nuit.
   Faire un détour par Selje est la seule solution se présentant à moi. Dans le ferry, les gens sont sympathiques. Ils regardent ma carte sur laquelle est tracée une petite partie de mon parcours. Ils inspectent mon vélo pour trouver une assistance électrique. Ils rient lorsque je leur dis qu’il est musculaire et que je vais au cap Nord. 
   Je ne sais pourquoi les Norvégiens rient lorsque je discute avec eux. Serait-ce à cause de mon vocabulaire assez limité pour engager une conversation ? Ou ma désinvolture pour une dame de mon âge ? Ou une façon d’entrer en communication avec moi ? Ou peut-être même de se réchauffer !
   Le ferry ressemble à un aéroglisseur avec un intérieur comparable à celui d’un avion. Il va vite et j’arrive rapidement à Selje. 
   Il est vingt-deux heures. Le village est là, sous mes yeux… Un vrai village avec des rues, un coiffeur, un minimarché, un pub-café et, en ce mois de juillet, des guirlandes de Noël illuminées à ses fenêtres ! 
   Un petit camping tout mignon, avec une cafétéria et une terrasse, est planté non loin de là. Tout est fermé lorsque j’arrive. Pour la première fois depuis que je pédale en Norvège, je vois un vélo Fahrrad de fille, couché sur le côté d’une petite tente. La cyclo-voyageuse dort déjà. 
   On peut imaginer que je fais une fixation sur l’organisation sociale, mais lorsque l’on est privé de relations et surtout aussi lorsque le cerveau n’est pas occupé par la lecture, la musique, la radio, le cinéma … un café, un restaurant sont des lieux privilégiés où le lien, la sociabilité reprennent leur place. 
   Pour la cyclo-voyageuse solitaire au long court que je suis, les rencontres sont fondamentales et retrouver un autre cyclo-voyageur me remplit de joie, me redonne de l’enthousiasme et l’optimisme utiles et indispensables à ce voyage.
Florø.
Florø.
Florø
Florø
De Florø à Selje
De Florø à Selje
Maloy
Maloy
Selje
Selje
Camping de Selje.
Camping de Selje.
Camping de Selje.
Camping de Selje.
Lundi 4 juillet – 51e jour
Selje – 15 km


Aaaaahhhh !!!! Selje…

   Je vais rester une journée à Selje.

   Eva lève le camp ce matin. Elle vit à Ulm une très jolie ville en Allemagne située sur le Danube. J’y suis passée lorsque j’ai suivi le Danube à vélo jusqu’à la mer Noire. C’est son premier long voyage à vélo. De l’Allemagne elle va rejoindre Trondheim. Elle a parcouru toute la côte du sud de la Norvège. Elle a été agréablement surprise ce matin de découvrir ma tente. Elle a un peu essayé le camping sauvage, mais cela ne lui a pas convenu. Elle se sentait trop isolée et les bruits nocturnes de la forêt ne la rassuraient pas vraiment.
   Comme moi, elle a acheté son vélo Fahrrad avec bien des difficultés dues aux problèmes industriels après l’épidémie de Covid.
   Comme moi, elle est enchantée de cette acquisition. 
   Après quelques instants elle part, son vélo lourdement chargé. Ce soir elle est hébergée chez l’habitant.
   Je m’installe sur la terrasse de la cafétéria. Je pensais les trouver plus au nord. Mais non ! les midges sont déjà là ! Ils sont à pied d’œuvre sur mon visage. Je suis un véritable festin ce matin pour ces petits moucherons qui ont besoin de sang pour survivre. Ils me causent d’innombrables points rouges sur le front. Les deux jeunes filles de la réception du camping ne présentent aucune morsure. Ce ne sera pas le top niveau style vestimentaire, mais j’ai un filet anti-moustique que je peux placer sur ma visière à large bord avant de sortir de ma tente. 
   Je pars à la découverte de Selje. Je commence par un thé au pub aux guirlandes de Noël. Je vais ensuite au syndicat d’initiative. Daniel travaille ici. Tout naturellement nous nous installons dans le salon de l’accueil pour discuter. Il habite à Volda, pas très loin d’ici et fait des études pour travailler à la maternelle. En Norvège, l’école maternelle n’est pas obligatoire, mais les communes sont tenues d'offrir des places à tout enfant de plus d'un an lorsque les parents le demandent. Nous sommes, en France, un des rares pays avec la Hongrie, à avoir une école maternelle obligatoire entre trois et six ans.
   Mon voyage l’intéresse. Il me pose beaucoup de questions. Il me parle de la Norvège, de l’habitat, des paysages, de la tristesse de la population lorsque la pénombre apparaît pour les longs mois d’hiver. La littérature nordique décrit bien cet état dépressif chez les gens du Nord. 
   Il me montre une vidéo de son appartement dans lequel il vient d’emménager. Sa terrasse a une vue splendide sur le fjord de Voldsfjorden. Cet aimable garçon me dit souvent s’asseoir là et contempler cette magnifique nature. 
   Les Norvégiens sont très proches de cette nature inspirant le respect. Elle est un cadeau pour tout le monde. Le pays autorise le camping sauvage. Quelques incartades dans mon itinéraire laissent voir des terrains moussus, plein d’humidité, parfois inondés. Cette éventuelle solution de repli ne me semble pas envisageable. L’été le plus humide en Norvège enregistré dans l’histoire est annoncé, mais je n’ai encore aucune idée qu’il est sur le point de se produire.
   La jolie maison typique norvégienne dans laquelle on a logé l’office de tourisme est un don récent des religieux. Elle a été rénovée par la municipalité tout en restant dans son origine première avec meubles et décorations. Cette maison est un lieu de rendez-vous pour les habitants et elle se visite. 
   Daniel me parle aussi de Selje, petit village touristique. En l’honneur de Sainte Sunniva, on peut visiter sur la petite île de Selja à quinze minutes de là, le plus ancien monastère du pays, construit par des moines bénédictins au début du douzième siècle.  Il n’en reste que des ruines. C’est aussi le plus petit diocèse au monde. On y apprécie une eau curative. Je ferai dans l’après-midi, l’agréable visite guidée de deux heures.
   Daniel a commencé l’apprentissage du français depuis une semaine, je lui donne son deuxième cours sur les mots d’usage. Il a autant de difficultés pour la prononciation française que moi pour la prononciation norvégienne.
   Selje est un village vivant, quelques petits baraquements en bois du centre-ville abritent un club nautique et une petite cafétéria avec surtout des « cochonneries » à manger et à boire. On se sert et on paie avec son téléphone. Personne n’est présent. 
   Surprise ! Devant la Coop, des enfants tournicotent sur leurs vélos. Ces derniers sont très rares sur cette côte de dentelle et pentue depuis Bergen. Je confirme que les petits supermarchés ont englouti les épiceries, les boulangeries, les boucheries, la Poste. Je vais parcourir sur une longue distance la Norvège et durant longtemps. Je pourrai au fur et à mesure en apprendre encore davantage…
   Mes premières étapes ont été la source de nombreuses surprises, difficultés, défis et leçons à tirer. Mes expériences précédentes à vélo ne m’ont jamais fait douter de la réussite de mes projets. Un voyage à vélo n’est pas un long fleuve tranquille, c’est sans cesse de nouvelles découvertes, des difficultés à affronter qu’il faut accepter sans se décourager, avec ténacité, opiniâtreté, obstination. 
   Ce moment passé à Selje m’aide à me ressourcer. Je commence à adopter ce pays.
Selje
Selje
Eva
Eva
Office du tourisme
Office du tourisme
Le pub de Selje.
Le pub de Selje.
Selje
Selje
Selje
Selje
La plage au centre de Selje
La plage au centre de Selje
Son église construite en 1865
Son église construite en 1865
Quatre panneaux scolaires des quatre saisons la décorent
Quatre panneaux scolaires des quatre saisons la décorent
Les bancs sont rembourrés
Les bancs sont rembourrés
Ce sont des cabanes pour les bateaux
Ce sont des cabanes pour les bateaux
L’église et ses cabanes à bateaux
L’église et ses cabanes à bateaux
Selje
Selje
Le monastère de Selja
Le monastère de Selja
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