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Philosophie du voyage nature 3

La philosophie de l'aventure

boutdevie - 27 janv. 2011
mis à jour le 29 janv. 2011
22 messages
J’ai beaucoup de demandes dans mes rencontres et j’ai essayé de décortiquer le sujet et de le noter noir sur blanc.

L’aventure est un vaste mot qui vient du latin adventura (ce qui doit arriver), il englobe beaucoup de chose.

On me définit comme aventurier, en vérité c’est un mensonge car chaque vie est une aventure et mon quotidien est fait de routine. Ce sont les autres qui en voyant mon rythme de vie me définissent en tant que tel.

J’admets que ma vie est un peu atypique, ma pension des anciens combattants est un solide soutien, mais j’en connais beaucoup qui ont le même titre sans trop se mettre en danger.

Je crois qu’à la base on naît avec, je n’ai jamais pu penser comme les autres ce qui me valut pas mal de soucis avec les institutions (école, armé).

Ensuite c’est ce côté chien fou mais craintif en même temps qui est important. Larguer les amarres doit être fait une fois, non pas, par force ou obligation, mais par conviction. Le premier pas est important, ensuite les « excuses ». Elles viennent taper à la porte les premiers jours, elles amènent dans leurs besaces les doutes et les remords. Je suis fou d’avoir tout largué, je suis fou d’avoir rompu avec la copine trop « non-non », je suis fou de laisser tomber mon boulot et l’avenir qu’il allait m’apporter et puis si je tombe malade…

Le mental rentre en jeu, comprendre que cela est sa voie. Puis le premier défi, finalement on s’aperçoit que ce n’était pas si difficile que ça, puis on croise des autres « fadas » qui parleront le même langage. Les rencontres sont rares surtout de part chez nous, l’Europe est devenue un aseptiseur de rêveurs aigus.

L’entourage est très important, il ne comprend pas et vous blâmera, donc à vous de vous imposer. Se réaliser en se moquant du « qu’en dira t’on ». La compagne est aussi la base de la réussite, jamais une fois Véro ne m’a freiné bien au contraire elle en est le moteur. Avant elle, certaines ont essayé de me calmer je suis devenu un souvenir d’un gars hyper actif au mauvais caractère.

Les pions se mettent en place tout seul, puis les seuils d’aventures grandissent, ma première fût de partir pendant 4 ans naviguer avec mon bateau, l’arrivée du Cabochard à Gibraltar restera un des grands moments de ma vie. Là-bas j’y ai rencontrés des gens qui avaient le même regard, la même folie non maitrisée. Je trouvais pour la première fois des frères et sœurs de vie.

L’idée murit, pourquoi ne pas continuer, ne pas franchir un autre pallié, je commence à écrire pour une revue nautique. Puis je rêve de plus fou, plus loin encore, alors je démarche mon premier sponsor et là c’est un flop ! Je sais que je commence une nouvelle vie. Les signes se succèdent et vous guident quand le doute secoue l'embarcation.

Je suis aventurier à part entière, je ne veux pas d’intérim, je veux porter cette parka 365 jours par an. Il m’est inconcevable de faire autre chose: vivre mes rêves les plus fous. Je ne veux pas devenir professionnel car j’aurais trop peur de m’enlever cette flamme de liberté, mais en même temps je ne veux pas que cela me coûte. Un juste milieu entre l’amateur et le professionnel.

J’en croise de temps à autre, les festivals d’aventures ont cette facultés de nous réunir juste assez pour ce sourire, jamais nous ne parlons de nos récits. Vous ne parlez pas de la couleur de votre voiture, du bilan de votre société, vous ne faîtes pas visiter votre appartement quand un nouveau arrive chez vous, vous ne laissez pas la télé allumé quand vous êtes entre amis…

Alors entre nous on parle de religion, de neige, de langue, de désert, d’éditeur…Vous voyez la routine. Je reviens d’un long voyage, mais dans ma solitude du grand Nord déjà des histoires venaient me gratter le bulbe de nomade. Vivre en immeuble, en pavillon, dans le même port, non merci. Chaque jour est le départ d’une journée incroyable, cela demande aussi une éthique, une dureté avec soi même, intransigeant intimement et exigeant avec l’équipe formée. Les tentations sont énormes, mais il faut savoir se diriger, ne pas s'égarer, garder le cap. Il est très facile de devenir l'insecte qui fonce dés qu'il voit une lumière, l'ombre est le dojo de l'aventurier déterminé.

Bien sûr dans ce milieu il y a plusieurs niveaux, les purs qui vivent toutes l’année dans leur tripes, j’en fais parti, mais nous sommes les intégristes de l’aventure, les médiatiques, grandes productions de documentaires qui a mon gout sont des réalisateurs hollywoodiens, mais la ménagère aime et adhère (soupir), puis les intermittents qui en goute une de temps à autre, mais qui doivent gérer tout un entourage réfractaire.

Le sujet est vaste mais je crois que j’en ai donné les trames, pour finir quand on me demande un conseil sur une préparation de tel ou tel projet, je suis acide, décapant, car ma réponse est toujours identique. Si tu me demande un conseil alors le seul que je puisse te donner c’est ne pars pas, car quand tu seras face à toi-même au milieu de nul part seul toi devra le gérer et mes conseils seront absolument inutiles.

Créé son histoire de A à Z :

Avant de gravir la montagne fait ton premier pas et apprend à être souvent seul. (Elle est de moi !!!) (Rire)
http://www.boutdevie.org/categorie/blog-frank-bruno/

Kulikool - 29 janv. 2011
82 messages
Grand merci pour ces riches phrases.

Kulikool - 30 janv. 2011
82 messages
Merci pour tes MP.

J'ai repensé à ton texte hier, et plus spécifiquement à sa fin :

boutdevie :
pour finir quand on me demande un conseil sur une préparation de tel ou tel projet, je suis acide, décapant, car ma réponse est toujours identique. Si tu me demande un conseil alors le seul que je puisse te donner c’est ne pars pas, car quand tu seras face à toi-même au milieu de nul part seul toi devra le gérer et mes conseils seront absolument inutiles.

Je comprends.
Mais en même temps j'ai des questions.

Pourquoi tes conseils me seraient-ils inutiles au milieu de nul part ?

Pourquoi aurais-je tort d'avoir envie de profiter de l'expérience de quelqu'un d'autre avant de partir ?
Je suis d'accord qu'un récit ne remplace pas une expérience de terrain et que rien ne la vaut, mais je devrais alors me lancer dans quelque chose sans rien demander à personne ? Sans m'informer ?

boutdevie - 31 janv. 2011
22 messages
Avant chaque grand départ je me suis préparé comme un guerrier partant au front.
18 mois avant ma traversée océanique j’étais inventeur d’une aventure à la rame, je suis sorti par tout les temps, j’ai beaucoup ramé mais j’ai inventé l’impensable, dés qu’on venait me voir avec le moindre conseil je savais que mon histoire était différente de la sienne. Une aventure doit être préparée avec ses images de références. A 18 ans j’ai perdu une jambe et la France à mis 10 jours pour me rapatrier. 10 jours ou j’ai lutté pour vivre et non pas pour établir une première mondiale, un père qui m’a éduqué à la dure sans concession et qui m’a bien fait comprendre qu’un métier ne s’apprend pas, il se vole.
Quand je suis parti traverser le Groenland en préparation j’ai longtemps erré sur le plateau du Coscione en Corse du sud balayé par des vents impressionnant en hiver, j’ai gravi les montagnes uniquement que quand il y avait tempête.
Pour ma balade en solitaire sur le fleuve Yukon j’ai arpenté les côtes corses en kayak l’hiver et j’ai inventé à 100% mon histoire. (J’ai chaviré, j’ai débarqué sur des cailloux aiguisés comme des lames, je suis parti sans nourriture plusieurs jours, j’ai pagayé 26h non stop avec un vent contraire de force 5 …)
Voilà comment je fonctionne, comment en pourrait-il être autrement. Je suis unijambiste et depuis le début dés que j’ai voulu faire quelques choses on m’a dit que c’était impossible. Alors je n’y ai jamais cru et su ouvrir ces portes verrouillées. Je suis moniteur de plongée sous marine, scaphandrier professionnel et plongeur sauveteur embarqué. En sortant major de promotion de cette école alors qu’on ne voulait pas du corse handicapé !
J’insiste une aventure doit s’inventer seul, Internet, les guides et autres gadgets ne sont que de faux amis. Seul devant un grizzli sans arme, je suis là pour le raconter, une vague scélérate qui brise mon safran au quarantième jour de rame, sans presque rien, j’ai réussi à réparer et repartir. Au milieu de l’Inlandsis mon moignon double de volume et le port de ma prothèse est devenue une torture, morphine, respiration et je suis devenu le premier mec porteur d’une différence à effectuer se type de traversée. Qui aurait pu me conseiller, qui peut comprendre comment je fonctionne ???
Je suis un solitaire de fond, un travailleur de l’intérieur…
Attention dans ce billet je parle de préparation d’Aventure, de première mondiale, de défi où les biens pensants te déclarent mort avant ton départ.
C’est clair que pour un tour de Corse en kayak, une balade au Canada les fans de guides auront besoins d’aide, mais une aventure pointue j’insiste vraiment, non, seul et contre tous.

http://www.boutdevie.org/categorie/blog-frank-bruno/

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